Les corporates au 1er Festival de Mode de Tunis
Par Fériel Berraies Guigny
photos Diane Cazelles
Parlez-nous de votre participation à ce 1er Festival de mode de Tunis ? C’est le premier en ce sens et il est inédit, son but est avant tout d’améliorer les échanges entre les pays Méditerranéens ; réunir les entrepreneurs tunisiens avec les entrepreneurs étrangers. Mais on peut dire également que c’est une reprise du milieu textile et l’occasion pour que les pays voisins riverains se rencontrent.
la designer tunisienne Fatma Ben Abdallah, et membre du jury du Festival @ Diane Cazelles
Aujourd’hui quelles sont les perspectives pour notre industrie textile? Nous avons tous les atouts pour qu’il y ait véritablement une mode « euromed » génératrice de revenus, d’échanges, d’innovations. Nos cultures se ressemblent, le climat également et l’art de vivre, c’est ce plus qu’il faut valoriser. L’échange culturel doit se consolider par un réel échange économique entre les pays deux rives. Nous avons besoin de bâtir de solides prospects pour l’avenir. Le textile tunisien doit être revalorisé et reboosté, la Tunisie reste quand même le 5e fournisseur en Europe pour l’entrepreneuriat.
Vos défis au quotidien, depuis la révolution ? J’affirme ma citoyenneté en étant toujours là, en continuant à me battre malgré les difficultés que nous vivons depuis l’après révolution. Je me bats pour garder mes emplois, pour garder mon personnel, pour trouver des marchés, pour m’améliorer tous les jours et ne pas penser « marge, bénéfices » c’est cela se maintenir !
Ethique et développement durable c’est possible, vu la conjoncture ? Si je me fie à la réalité, je risque de baisser les bras, mais je regarde toujours en avant et je projette tous les jours et je me dis qu’il faut continuer et que l’on finira par réussir.
La place de la femme artisane et la femme « tout cour » entrepreneuse et autre, quel est le bilan ? On a des peurs en ce moment et c’est certain, vu toutes ces revendications ! Parfois on voit le mal que font les récupérations politiques. Sur le plan entrepreneurial, oui, il y a quelques lenteurs, mais je ne suis pas une industrielle et je ne suis ni une petite ou une moyenne entreprise. Je suis peut être sauvée par cela. Je suis dans l’Art, l’artisanat, le fait main et le produit de luxe. Je vois autour de moi des entreprises qui ferment mais pas seulement du fait « post révolution » mais parce qu’il y a moins de marchés. Mais il faut être réaliste : le pays s’est fermé, les gens ont peur.
Un recul ? oui il est là, il ne faut pas se voiler la face, mais des initiatives comme le festival de la mode, c’est dire que la Tunisie est là, que la filière textile est là, que le pays est calme et il ne faut pas s’inquiéter. On travaille, on avance, il faut faire avec et cela va s’améliorer et surtout ne pas baisser les bras.
Une pensée pour vos sœurs arabes ? Oui nous avons tous les jours une pensée envers nos sœurs arabes qui vivent des situations critiques et on a cette solidarité. Mais tant qu’il y aura des femmes qui se battent, on est là pour prouver aux mouvances conservatrices, qu’il y a aussi d’autres catégories de femmes qui ont travaillé dur et qui ont milité depuis l’indépendance de la Tunisie.
La Burka et le Tchador pas notre vêtement !? et le vivre ensemble alors ? Absolument cela n’est pas de notre culture il faut le préciser et pour ce qui est du vivre ensemble on y croit encore. Il faut se battre pour que chacun ait sa place et surtout qu’il respecte l’autre. Pour que tout le Monde vive en Harmonie et que personne n’oblige qui que ce soit ni à porter ni à ôter le voile ! ni à faire ou pas sa prière, c’est cela la Vraie Tunisie et elle doit le rester !
Ce n’est pas votre Tunisie, l’actuelle ? Non ce n’est pas ma Tunisie, on a vécu autre chose et ce n’est certainement pas nos coutumes, on a toujours été croyants et musulmans et on fait nos prières. Nos parents et nos aïeux nous ont inculqué l’Islam, on n’a pas besoin de Niqab ou de Burka pour être musulmanes.
Il faut accepter la diversité ; pour autant, si la Tunisie bascule dans le Wahabisme ? Elle ne basculera pas tant qu’il y aura des femmes.