Par Fériel Berraies journaliste et Sophrologue Certifiée RNCP spécialisée dans l’Accompagnement des malades du cancer
La Sophrologie est un soin de support qui prend de plus en plus de place dans les plans de lutte contre la maladie en Europe, mais qu’en est-il en Afrique Subsaharienne où cette maladie presque tabou, a du mal à faire sa place ?
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L’Absence de diagnostic précoce et de systèmes de dépistage rend le cancer peu visible en Afrique subsaharienne. En tout cas, quand il vient à l’hôpital, il n’y parvient qu’à un stade avancé de la maladie, requérant souvent au préalable des ablations, trachéotomies ou amputations avant de pouvoir — et pas toujours — proposer un traitement par radiothérapie et chimiothérapie. Ceux-ci sont violents, imposent des vomissements, des douleurs impensables. Les conditions cliniques dans lesquels se présentent les patients n’ont d’équivalent que l’extrême pression dans laquelle travaillent les soignants sur le plan matériel, émotionnel et médical.
Au cœur de l’incertitude, le cancer se fraye son chemin en Afrique et nous sommes ni plus ni moins face à une impuissance thérapeutique et épidémiologique. Si l’absence de diagnostic et en conséquence le manque de données épidémiologiques sur le cancer en Afrique a contribué à le rendre invisible, c’est tout notre imaginaire du cancer qui doit être retravaillé et remodelé pour comprendre toutes les dimensions de cet enjeu de santé publique.
Pourtant, le cancer n’est pas l’apanage du monde « moderne », il est très répandu en Afrique où il a toujours été présent. Comme la tuberculose puis le sida, il est le résultat d’une économie politique régionale du travail minier qui a favorisé le développement des maladies infectieuses dans certaines parties de l’Afrique comme en Afrique Australe par ex et comme l’ont montré Randall Packard, Meghan Vaughan et Didier Fassin en Afrique australe, en particulier en raison des conditions de vie et de travail dans les mines, de l’exposition aux rayons, la consommation d’alcool et de tabac, etc. Dans la même veine, J. Livingston décrypte une carcinogénèse complexe et invisible historiquement construite dans le rapport de l’Occident à l’Afrique. Sur fond de domination impériale et d’infériorisation raciale, un « modèle étriqué de la santé publique » n’a considéré quasiment que les maladies infectieuses, et en particulier les infections sexuellement transmissibles, et a été obnubilé par la question du contrôle démographique. Cette lunette étroite a entraîné des erreurs d’évaluation, renforcées par un rendez-vous raté de la virologie et de l’oncologie, d’autant plus dommage que les premiers virologues travaillant sur le VIH étaient des virologues oncologues. Le cancer en Afrique n’a pas eu l’occasion d’exister pourtant il est là et il ravage tout autant !
Puis, la ruée scientifique sur le sida et la nécessité de contenir une menace infectieuse par sa pharmaceuticalisation ont continué de produire de l’ignorance sur le cancer. Or le cancer resurgit avec encore plus de force avec l’épidémie de sida car les antirétroviraux allongent la vie des personnes séropositives tout en les exposant à des coïnfections multiples, qui sont autant de susceptibilités au cancer. Le VIH complique énormément la gestion du cancer, le rend plus douloureux voire plus obscène.
Le cancer touche surtout les femmes en Afrique
Longtemps ignoré au profit des maladies transmissibles tels que le VIH et la malaria, le cancer est devenu un risque de santé publique majeur en Afrique emportant des centaines de milliers de vies chaque année. l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) dénombrait plus de 840 000 nouveaux cas et 600 000 décès, des chiffres qui sont probablement sous-évalués compte tenu de l’absence de statistiques fiables dans de nombreux pays et ce dés 2012.
En raison du vieillissement de la population et des changements du niveau de vie, la tendance va s’accélérer et on estime que les taux de cancer en Afrique augmenteront de plus de 85% d’ici 2030.
Bien que le cancer touche toutes les régions du monde, les taux de mortalité liés aux cancers diagnostiqués sont plus élevés en Afrique qu’ailleurs en raison de la disponibilité plus limitée des médicaments, ainsi que des méthodes de dépistage, prévention, diagnostic et traitement. Le diagnostic et le traitement du cancer doivent dès lors devenir une priorité pour les décideurs politiques et économiques, les professionnels de la santé et les acteurs du développement si on veut réduire la prévalence de ce fléau sur le continent.
Les cancers féminins les plus présents en Afrique !
Les femmes représentent 59% des nouveaux cas détectés et 55% des décès. Une réelle tragédie et pourtant il faut commencer à sensibiliser et à démocratiser les soins de prévention pour les femmes.
Quelle est la place des soins de support alors?
Que peut faire la Sophrologie en Afrique dans des structures cliniques pour accompagner les malades qui sont soit en rémission soit au début de maladie ?
Les grands axes sur lesquels la Sophrologie travaille, englobe divers protocoles dont celui relatif à « l’acceptation de la maladie » et à « l’observance thérapeutique » La Sophrologie intervient en tant que soin de support ( mais ne se substitue pas aux traitements en cours ou à un quelconque autre suivi)
Les soins de support ou traitements de confort ont pour vocation d’amener au malade du cancer une meilleure qualité de vie et se définissent comme l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades tout au long de la maladie, conjointement aux traitements oncologiques.
Les soins de support permettent une prise en charge globale et apportent une aide sur les plans psychologiques, physique et social et économique. Pour cela, ils tentent de diminuer les symptômes et les conséquences de la maladie et les effets secondaires des traitements
Ils peuvent être proposés pendant et après les traitements et s’adresse également aux proches du malade quand cela est nécessaire.
Depuis quelques années, les médecins proposent la sophrologie comme technique d’accompagnement possible dans le cadre de ces soins de support.
De nombreuses études démontrent en effet les effets bénéfiques de la relaxation et de la visualisation positive sur les effets indésirables de la chimiothérapie (nausées et vomissements), des symptômes psychologiques de la maladie (anxiété, dépression, colère, etc.) et le fonctionnement optimal du système immunitaire ont été démontrés
L’efficacité de la Sophrologie et ses larges champs d’application permettent à la personne atteinte du cancer de redevenir actrice de « son mieux vivre les traitements » et d’améliorer sa qualité de vie dans les différentes périodes de la maladie.
Pourtant… après le choc du diagnostic, le choc des traitements
L’annonce d’un diagnostic de cancer engendre toujours un changement de statut important.
La personne perd son statut de « bien portant » ou en rémission à celui de « malade ». Dans les deux cas elle doit faire le deuil de son bon état de santé pour pouvoir affronter la maladie
Certains malades sont persuadés que d’autres traitements sont possibles et refusent les propositions de traitement, ils cherchent d’autres avis et propositions.
D’autres les refusent « de toute façon ça ne sert à rien » je mourrai quoi qu’il arrive »…
Les malades ont des représentations négatives sur les traitements et craignent les effets secondaires, et la dégradation de leur état
La confusion entre la maladie et les effets secondaires, la maladie étant associée au traitement et non au cancer, peut amener à abandonner l’observance thérapeutique.
L’Observance thérapeutique
L’Observance thérapeutique est la capacité pour le malade à prendre son traitement et à suivre les différentes recommandations (faire un régime, arrêter de fumer ou de boire, faire de l’exercice etc.) Prescrits par son médecin. C’est une condition essentielle pour que le traitement puisse être efficace et permettre au malade de guérir.
L’observance thérapeutique demande en effet, une adéquation entre le comportement et la capacité à gérer le traitement jusqu’au bout.
Pour une observance thérapeutique maintenue, il est nécessaire que le malade adhère au traitement et aux recommandations prescrites (adhésion thérapeutique)
En effet, l’intensité et le nombre des effets secondaires, le cout financier, l’impact social et les bénéfices apportés par ces prescriptions conditionnent leur suivi.
La personnalité du malade (contrôlant, rebelle, etc) et son état psychologique (anxiété, dépression etc) contribuent également à assurer ce comportement.
Les difficultés auxquelles sont confrontées les malades, sont diverses et variées : elles touchent l’individu dans sa globalité : impactant à la fois son physique ( douleur, fatigue, troubles physiologiques, ablations etc.) son état émotionnel ( angoisses, tristesse, désespoirs etc.) ses capacités cognitives ( troubles de la mémoire, de la concentration etc.) sa perception de lui (image de soi dégradée, perte de contrôle et d’autonomie etc.) ses relations sociales ( famille, amis, collègue, personnel soignant etc.) mais aussi ses valeurs existentielles et ou spirituelles ( sens de la vie, de la maladie, aspirations religieuses ou philosophiques, etc.)
La durée et l’intensité de ces difficultés étant généralement corrélées à la durée des traitements, il est courant d’observer une perte d’adhésion thérapeutique après quelque temps.
Le malade remet en cause son traitement et n’a plus envie de le suivre.
Lorsqu’il décide, sans accord médical, de suspendre son traitement, le malade peut avoir l’illusion durant les premiers jours, d’aller mieux. Cependant, si ce manque d’observance thérapeutique perdure dans le temps, il anéantit les effets bénéfiques du traitement et permet au cancer de se développer à nouveau. Le malade détruit alors ses probabilités de guérison.
En dehors de la problématique du ou des traitements, les conséquences physiques ou psychiques du diagnostic d’un cancer ou de sa récidive impactent l’état de bien être de la personne dans sa vie de tous les jours.
Il s’agit ici de faire le « deuil « de son bon état de santé. Et accepter la perte de cette santé qui peut être parfois définitive. Il lui faut aussi « supporter et ou accepter les traitements » et leurs effets secondaires.
Il faut pour le « client » dépasser la tristesse au quotidien ou la douleur de cet état de fait, mais aussi résister aux traitements.
Le protocole pour l’observance thérapeutique est un protocole d’accompagnement d’un traitement médical, car il permet à la personne de mieux gérer ses effets secondaires et de participer activement à son « mieux être » durant les différentes étapes de la maladie.
Ce protocole a pour objectif d’amener la personne souffrant d’un cancer à suivre facilement son traitement. Pour cela, elle doit apprendre à évacuer ses croyances négatives, gérer les effets secondaires et valoriser les traitements.
Par ailleurs, un Protocole de Préparation mentale peut aussi être proposé pour anticiper un examen, un soin ou un acte chirurgicale afin d’optimiser le potentiel physique, mental et émotionnel de la personne malade. Cet accompagnement lui permet alors de vivre sereinement l’intervention médicale.
Quelles sont les demandes possibles ?
« Ne plus redouter le traitement » ou « croire en l’efficacité du traitement » ou encore, « retrouver la combativité »
Objectif de l’accompagnement en Sophrologie ? Suivre facilement le traitement !
L’observance thérapeutique est le suivi du traitement et des recommandations prescrites
Le malade est souvent confronté à certaines difficultés lors de l’observance du traitement
Physique : nausées, douleur, fatigue
Emotion : stress, peur, angoisse, dépression
Capacités cognitives : difficulté de la mémoire et de la concentration
Difficultés relationnelles : s’isole, se protège
Réactions existentielles ou spirituelles : pour lui tout est joué et cela impacte sur sa vie
Difficultés financières : traitements budgétivores
Durant ce Protocole relatif à l’observance thérapeutique, le sophrologue va essentiellement travailler sur les points suivants dans des séances incontournables :
1) Chasser les croyances négatives pour se transformer
2) Mieux gérer les effets secondaires pour modifier les ressentis, mais si cela n’est pas encore « maitrisé » on peut encore ajouter une autre séance sur la douleur
3) Valoriser le traitement pour aider le client à prendre conscience de l’évolution de ses perceptions sur le traitement