Dans l’empire de la Fast Fashion et du consommé jetable, rien ne va plus depuis quelques jours en France. Grandeur ou décadence ? ou Décadence annoncée depuis des mois, rien ne va plus chez SHEIN, cette célèbre plateforme d’achat en ligne qui décidemment continuer de collectionner tous les Dont possibles et inimaginables.

par Fériel Berraies Guigny editor
Pourtant depuis des décennies, les marques de la fast fashion se sont taillées une place de roi dans le paysage de la consommation. Pas chère, facile d’accès sur le net, campagnes esthétiques mais trompeuses, elles continuent de séduire, un certain consommateur.

De Primark, à Kiabi, a Zara ou Mango dans une moindre mesure… on est habitués.
Ces tendances font partie du paysage. Que cela plaise ou non. Tout est fast, tout est cheap, tout s’achète au numérique, tuant bon nombre de boutiques et d’enseignes. Alimentant une frénésie d’achat qui parfois frise les extrêmes surtout chez les jeunes. Des produits qui finissent à la poubelle, et que l’on ne peut pas dégrader biologiquement, vue que c’est du synthétique!
On consomme de plus en plus, on jette de plus en plus, c’est de plus en plus cheap, polyester et made in China oblige, et même les marques s’y mettent, on a de plus en plus de polyester, cela est fait en Asie. La dite marque a toujours les mêmes prix mais la qualité elle se dégrade au fil des ans.
Quant à la santé du consommateur on s’en fiche, on finit par dormir et porter du pétrole à toute heure de la journée, sans être conscient du mal que l’on se fait, tout cela sur l’autel de l’esthétique et un rêve addictif qui est loin de rendre service à la planète et à l’emploi!

Pourtant c’est un modèle économique qui attire et qui se trace une place de choix dans les habitudes des consommateurs dont le pouvoir d’achat baisse chaque année.
SHEIN l’ECOCIDE ANNONCE
Mais quand les scandales sanitaires refont surface et que l’on parle même de délinquance, de pedocriminalité, de ventes de produits illicites ou sérieusement dangereux pour nos enfants, alors on voit qu’une frontière à été dépassée. Il ne s’agit pas de fast fashion only, de gaspillage, de fléau environnemental ou sanitaire, de concurrence déloyale, de commerce illicite, il s’agit de Sécurité !
Alors qu’en France SHEIN est dans la tourmente, que le gouvernement Français vient tout juste de jeter une procédure de suspension de la plateforme d’e-commerce chinoise, il est intéressant de se poser les bonnes questions.
Autopsie d’un marchand de rêve corrompu
Un Site de commerce ou le pire peut s’acheter
Un député LR de la Loire, a saisi la justice affirmant après scrolling, que l’on pouvait y trouver des armes de catégorie A — machettes et poings américains— comme il l’a dénoncé.

La marque SHEIN retire en général le produit incriminé, reportant la faute sur un fournisseur, mais au départ n’était pas elle consciente?
Cette fois ci , les poupées sexuelles à l’effigie d’enfants, une ligne intolérable qui a été dépassée.
Pourtant SHEIN à la base n’était ce pas est un site d’e-Commerce dédié à la fast fashion only?
Le site de mode le plus populaire au Monde
Un site qui peut se targuer d’avoir une croissance exponentielle depuis le lancement de la boutique en ligne en 2014 et l’arrivée de l’application, devenue numéro 1 aux États-Unis en 2021. Avec des campagnes addictives et des produits vendus en moyenne 7 euros, SHEIN a aspiré les consommateurs du monde entier.
Mais ce modèle commercial est pourtant loin d’être vertueux pour ceux qui s’y intéresse un peu.
470 000 modèles en temps réel, fabriqués en flux tendus, cela signifie pas mal de squelettes dans l’armoire : conditions de travail intolérables: 75 heures par semaine, avec un seul jour de repos par mois — ce qui viole la législation chinoise.
Des infractions au Green Washing décomplexé
C’est l’ADN de SHEIN qui violent bien des législations du monde dont l’européenne
Des jouets et produits dangereux pour les enfants, des procès en cours pour plagiat, copie de design ou violation de marques.
MAIS IL EST TOUJOURS DANS LE PAYSAGE ET ON ACHETE !!!
Avec ses fausses promos, aussi ! En juillet 2025, SHEIN a été condamnée en France à une amende de 40 millions d’euros pour pratiques commerciales trompeuses. Des enquêtes à ce sujet ont montré que 57 % des offres ne présentaient aucun rabais ; pire : 11 % des « promos » affichaient en réalité une augmentation du prix !
Du greenwashing délétère , avec des émissions de carbone qui ont augmenté de 80 % entre 2022 et 2023, selon l’ONG Paris Good Fashion !
La liste est longue, mais le rapport à la consommation est le même.
Les conditions s’y prêtent, on a pas les sous pour les marques et le durable mais on veut faire comme les autres. Et le pouvoir d’achat du citoyen est bas. Logique alors me direz vous.
Pourtant hier,
le gouvernement français lançait une procédure de suspension contre la plateforme d’e-commerce chinoise SHEIN, le jour même de l’ouverture à Paris de son premier magasin physique…
UFFP s’est entretenue avec Catherine Dauriac spécialiste de la mode éthique sur le phénomène :

Catherine Dauriac
Shein au BHV c’est impensable non ?
L’implantation de Shein au BHV illustre plusieurs tensions majeures de notre époque :
Un symbole de contradiction culturelle
C’est frappant de voir une enseigne de fast-fashion ultra-low-cost s’installer dans un grand magasin
parisien historique, symbole traditionnel d’un certain raffinement et d’un commerce « à la française ». Cela
marque une rupture avec l’image que Paris (Capitale mondiale de la Mode) cherche à projeter en matière
de mode et de durabilité.
Mais la problématique c’est aussi la réalité sociale qui fait que ?
Le fossé entre discours et pratiques et bien là.
Paris se positionne comme ville pionnière sur l’écologie, avec des mesures fortes contre la fast-fashion.
Mais cette implantation révèle le décalage entre les ambitions politiques et la réalité économique : les
centres commerciaux ont besoin de revenus, et ici Shein apporte du trafic et des loyers substantiels.
Un conflit générationnel et social qui expose une fracture ?
La controverse expose cette fracture : d’un côté, des consommateurs (souvent jeunes, avec moins de
pouvoir d’achat) attirés par des prix imbattables ; de l’autre, des voix (associations et ONG, créateurs
Made in France, marques éthiques) qui dénoncent l’impact environnemental et social. La file d’attente à
l’ouverture malgré les manifestations en dit long sur cette division.
Le numérique a tout tué, les boutiques physiques ont de plus en plus de mal ?
La puissance du modèle digital qui s’ancre dans le physique, il faut y penser et c’est assez significatif qu’une marque née 100% en ligne choisisse Paris pour son premier magasin permanent
mondial. Cela montre que même les géants du e-commerce reconnaissent la valeur symbolique et
commerciale d’une présence physique dans des lieux emblématiques. C’est aussi un moyen de contourner la future loi anti ultra fast fashion qui se focalise sur les market-places.
Cette situation pose une question fondamentale : peut-on réellement concilier accessibilité
économique et responsabilité environnementale ?
Le Savoir faire le Made in France, on en fait encore des salons – d’ailleurs un
actuellement se tient, quelle est la réalité économique et sociale de ces espaces qui
restent budgétivores pour les marques actuelles?
Excellente question qui met le doigt sur un paradoxe crucial ! Effectivement, le MIF Expo se tient
actuellement (6-9 novembre 2025) à Paris Porte de Versailles avec plus de 1 000 exposants et 110 000
visiteurs attendus et la Grande Exposition du Fabriqué en France aura lieu les 15-16 novembre à l’Élysée
avec 103 lauréats sélectionnés. Ces salons représentent un coût considérable pour les PME et artisans : location de stand (plusieurs milliers d’euros), aménagement et scénographie, stocks à transporter, personnel mobilisé pendant 4 jours, communication et supports marketing…
Pour beaucoup de petites structures, c’est un investissement de 5 000 à 15 000 euros minimum, sans
garantie de retour immédiat.
Le dilemme de la visibilité versus moyens pour celle ci?
Oui ces salons fonctionnent comme une vitrine de légitimité plus qu’un canal de
vente direct. Ils offrent une caution « qualité » et « sérieux », des contacts presse et distributeurs, une
présence Instagram/réseaux sociaux, la possibilité de networking avec d’autres artisans. Mais
concrètement, combien de visiteurs achètent réellement sur place versus ceux qui prennent juste
une carte de visite ?
C’est là que le contraste avec Shein est saisissant : pendant que les artisans français paient des fortunes
pour quelques jours d’exposition, Shein s’installe en permanence dans un espace de 1 000 m2 au BHV,
probablement avec des conditions commerciales avantageuses vu le trafic généré.
Les marques Made in France sont coincées dans un modèle événementiel coûteux et ponctuel, tandis que
les géants de la fast-fashion bénéficient d’une présence continue et accessible au quotidien.
La question de fond : ces salons servent-ils encore ?
On peut légitimement se demander si ce modèle n’est pas devenu un entre-soi où l’on célèbre le savoir-
faire… entre convaincus. Les 110 000 visiteurs du MIF Expo, c’est beaucoup en apparence, mais dérisoire
comparé aux millions de consommateurs qui entrent chaque année au BHV.
Ces salons maintiennent peut-être artificiellement en vie un mythe du Made in France déconnecté des
réalités de distribution et de prix, pendant que le consommateur lambda fait ses courses ailleurs.
Mais concrètement, combien de visiteurs achètent réellement sur place versus ceux qui prennent juste une carte de visite ? C’est LA question que personne ne pose publiquement, et pour cause : les chiffres sont probablement assez décevants.
Ce qu’on peut déduire de la réalité terrain :
Les salons annoncent fièrement « 110 000 visiteurs » mais restent très flous sur :
Le panier moyen réel
Le taux de conversion visiteur/acheteur
Le CA généré par exposant
La plupart des visiteurs sont dans une logique de « lèche-vitrine patriotique » : ils viennent « soutenir
moralement » le Made in France, prennent des photos pour Instagram, accumulent cartes de visite et flyers, se disent « j’achèterai sur le site plus tard » (spoiler : rarement), achètent quelques petits articles impulsifs (savons, bougies à 15-20€)
Les vrais acheteurs sont minoritaires : on peut estimer que sur 110 000 visiteurs, peut-être 15-20%
achètent réellement sur place, et souvent des petits montants. Les gros achats (meubles, vêtements à 200€ +) sont exceptionnels.
Ce que les organisateurs ne disent pas clairement c’est que ces salons servent surtout à : décrocher
des contrats de distribution (boutiques concept stores, grands magasins), rencontrer des acheteurs
professionnels des enseignes, obtenir une couverture presse, créer du contenu marketing (« vu au MIF
Expo »)
Faisons un calcul “cynique” :
Un exposant qui dépense 10 000€ pour le salon espère peut-être faire 5 000€ de CA sur place, mais
surtout décrocher UN bon contrat de distribution qui justifiera l’investissement. C’est un pari sur l’avenir,
pas une opération rentable immédiatement.
Pendant ce temps, au BHV :
Shein accueille des clients qui viennent pour acheter, pas pour flâner. Taux de conversion probablement 5
à 10 fois supérieur. Budget moyen peut-être inférieur, mais volume incomparable.
Le modèle salon Made in France ressemble de plus en plus à un circuit fermé subventionné (souvent par
les régions, CCI, etc.) qui fait vivre davantage les organisateurs d’événements que les artisans eux-mêmes.
C’est ce que j’ai pu observer au cours de mes 35 années de travail dans la mode. Les salons professionnels B2B s’essoufflent. Attention, je ne suis pas contre leurs existences ! C’est une observation critique qui doit être énoncée.
Le durable, l’éthique, est cher, que pensez vous des méthodes utilisées pour la valorisation du Made
in France face à certaines marques jugées déloyales?
Vous touchez à un nœud critique : à mon avis, le Made in France s’est enfermé dans une posture morale
qui le dessert. Les défenseurs du Made in France utilisent souvent des arguments culpabilisants :
« Si vous achetez Shein, vous êtes complice d’écocide »
« Le vrai prix des vêtements, c’est celui du Made in France »
« Consommer responsable, c’est un devoir citoyen »
On le voit en interviewant les gens (pas plus tard que mercredi dans les files d’attente du BHV). Ce
discours crée une fracture de classe déguisée en choix éthique. On oppose les « bons consommateurs
conscients » aux « mauvais consommateurs inconscients », alors que la vraie ligne de fracture est
souvent économique.
Dire « le durable est forcément cher » arrange bien les marques Made in France qui peuvent justifier des
marges confortables. Mais est-ce toujours vrai ?
Une partie du surcoût est réelle (salaires, normes, qualité)
Une autre partie relève du premium positioning et du marketing
Certaines marques « éthiques » ont des marges similaires à celles du luxe
Le consommateur n’est pas dupe : il sent quand on lui vend un t-shirt 80€ dont 30€ financent le
storytelling Instagram.
Que dit l’avocat du diable ? Les méthodes utilisées pour les campagnes anti-Shein révèlent plusieurs
approches :
La pétition lancée par la collectif UAMEP sur change.org (125 000 signatures) et la
manifestation (cortèges devant le BHV) sont efficaces médiatiquement, mais donnent une image élitiste :
« on veut interdire aux pauvres d’acheter pas cher ». La dénonciation scandaleuse (poupées sexuelles
d’apparence enfantine) est légitime quand c’est avéré, cependant utilisée parfois comme arme de
distraction massive pour éviter le vrai débat : pourquoi Shein séduit-il ?
Le plaidoyer pour la taxation : Emmanuel Grégoire et d’autres appellent à une taxe sur la fast-fashion
ultra-low-cost. Cohérent intellectuellement, mais politiquement toxique : « on va rendre les vêtements plus
chers pour les classes populaires », comme le disent les clients de fast fashion.
Réfléchissons sans émotivité. Ce qui ne marche PAS vers le grand public consommateurs d’ultra fast
fashion :
❌ Faire honte aux consommateurs (de Shein et d’autres marques Primark, Kiabi…)
❌ Expliquer que « le vrai prix d’un jean, c’est 150€ » (vs 30 à 40€) ❌ Ignorer la réalité : beaucoup de gens n’ont objectivement pas les moyens
Alors quelle solution, quelle mode ecofriendly pour le futur?
Ce qui pourrait marcher (mais qu’on fait peu)
✓ Créer des gammes accessibles Made in France (50-80€ pour un jean, pas 180€)
✓ Développer la seconde main française massivement
✓ Proposer des solutions de location/abonnement pour les vêtements de qualité
✓ Arrêter de vendre du « lifestyle » et vendre de la durabilité économique : « ce jean tiendra 10 ans, voici le
calcul »
✓ Créer des coopératives d’achat pour réduire les coûts
Mais si on veut aborder les vraies questions de fond?
Oui le problème de fond : l’absence d’alternative crédible
Les marques Made in France demandent aux consommateurs de faire un effort financier énorme, mais
sans proposer de solution de transition. Entre un t-shirt Shein à 5€ et un t-shirt Made in France à 45€, il
n’y a… rien.
La vraie question stratégique réside dans l’entre deux, le milieu ?
Plutôt que de manifester devant le BHV, ne devrait-on pas se demander : pourquoi le Made in France n’a-
t-il pas été capable de créer son propre modèle de distribution efficace ?
Pourquoi n’existe-t-il pas une « chaîne de magasins Made in France » avec :
Des prix compétitifs grâce au volume
Une qualité garantie
Une présence nationale permanente
Une vraie marque grand public.
Au lieu de ça, on a des salons éphémères, des concept stores confidentiels, et des pétitions contre ceux qui ont réussi à résoudre l’équation de la distribution de masse.
Alors si les questionnements sont mauvais et qu’il n’y a pas de remise en question, quels risques à venir ?
Le risque et je pèse mes mots :
En diabolisant Shein sans proposer d’alternative accessible, le Made in France se condamne à rester
un marché de niche pour classes moyennes supérieures, tout en se donnant bonne conscience avec des
salons et des labels.
La France est menacée par la Chine? que pensez vous de la position actuellement du gvt? quid du
scandale sur la pedo pornographie? Ethique versus réalité sociale, les marques se cassent la gueule
au profit du numérique, beaucoup de marques francaises dont Rene Derhy, Caroll, etc utilisent le
polyester, le viscose et le made in china? LVMH a même été éclaboussée par la Chine au passage
concernant les sacs? qui croire ?
Prenons le temps de démêler cette pelote de contradictions. Vos questions sont excellentes car elles
révèlent l’hypocrisie structurelle du discours sur le Made in France.
- La position du gouvernement : réaction tardive et opportuniste
Le gouvernement a annoncé mercredi 5 novembre une procédure de suspension de Shein, le jour même de
l’ouverture du magasin au BHV. Le timing est révélateur : pourquoi attendre ce moment symbolique ? - Je vais essayer de rester objective 🙂
Le motif officiel : vente de poupées sexuelles d’apparence enfantine et d’armes de catégorie A.
C’est légitime, mais aussi terriblement commode. Ces produits étaient vendus par des tiers sur la
marketplace Shein, pas par Shein directement. Je précise qu’évidemment je trouve cela particulièrement scandaleux, à l’inverse de toutes nos valeurs morales. Amazon, Alibaba, eBay ont eu des scandales similaires sans suspension nationale.
L’avocat du diable : Le gouvernement a trouvé l’angle d’attaque parfait pour agir sans assumer le vrai débat : veut-on vraiment protéger les consommateurs ou protéger un secteur économique français qui ne parvient plus à être compétitif ?
C’est l’arme parfaite : moralement inattaquable, émotionnellement chargée, et permet d’éviter le débat de fond sur la concurrence déloyale.
Dire « on ferme Shein pour pédopornographie » est politiquement tenable. Dire « on ferme Shein parce qu’ils cassent les prix » serait ingérable socialement.
« La France menacée par la Chine » : vraie question, mauvaise réponse
Oui, il y a un vrai problème systémique comme les exemptions douanières sous 150€ (4,6 milliards de colis en 2024 dans l’UE), les contrôles insuffisants sur les importations, les Normes sociales et
environnementales contournées… Mais fermer Shein ne résoudra rien. Dix autres plateformes similaires, potentiellement encore plus opaques, émergeront pour combler le vide.
L’hypocrisie du Made in France : vos exemples sont parfaits
Vous mettez le doigt sur la plus grande imposture. René Derhy, Caroll, et tant d’autres « marques
françaises » utilisent massivement polyester et viscose (dérivés pétrochimiques, 65% des matières textiles mondiales), fabriquent en Chine, Bangladesh, Turquie, Myanmar… Se parent d’une image « française » tout en ayant des pratiques similaires à Shein, et vendent 3 à 5 fois plus cher grâce au capital symbolique de la »marque française ».
Le vrai scandale : Ces marques bénéficient d’une présomption de qualité et d’éthique alors qu’elles ont
exactement les mêmes fournisseurs que les plateformes décriées.
A propos de LVMH et la Chine sur le scandale des sacs
Précisons pour être factuels : en avril 2025, une campagne virale sur TikTok affirmait que les marques de
luxe produisaient leurs sacs en Chine. C’était de la désinformation : il s’agissait de contrefaçons présentées comme des produits authentiques selon des sources variées comme MIF Expo et la Mairie de Paris entre autres.
MAIS (et c’est crucial) : Louis Vuitton fabrique des pièces en Chine et en Roumanie qui sont ensuite
assemblées en France pour obtenir le label « Made in France » selon le Ministère des Finances) Ministère
des Finances.
Donc LVMH n’est pas « éclaboussé » par un scandale de fabrication chinoise au sens où ils feraient
fabriquer leurs sacs iconiques là-bas, MAIS ils utilisent bien la sous-traitance chinoise pour certains
composants. Et surtout, ils bénéficient de l’ambiguïté du label « Made in » qui ne concerne que l’assemblage final.
Qui croire ? Personne. Voici la réalité
Le Made in France « pur » n’existe presque plus, même chez les donneurs de leçons :
✗ Les marques françaises mainstream (Caroll, Promod, etc.) = production délocalisée, marketing français
✗ Le luxe français repose sur un assemblage final en France, pour des compsants composants
mondialisés
✗ Les « petites marques éthiques » sont souvent sincères, mais pratiquent des prix prohibitifs et des
volumes dérisoires.
Le vrai problème : On a créé un système où :
Les riches peuvent se payer du « vrai » Made in France (artisanat, petites séries)
Les classes moyennes achètent des marques françaises qui produisent en Chine
Les classes populaires vont directement chez Shein
Et tout le monde fait semblant de ne pas voir l’imposture du milieu.
Éthique versus réalité sociale : le grand mensonge
Vous avez raison : « le durable est cher » arrange tout le monde sauf le consommateur.
Les marques françaises utilisent du polyester chinois, mais se parent de valeurs éthiques pour justifier des
prix 3 fois supérieurs à Shein. C’est exactement la même production, avec une marge marketing en plus.
Le vrai scandale : Une marque comme Caroll vend un pull en polyester Made in China 80€, quand Shein
le vend 15€. Où sont les 65€ de différence ?
10€ de meilleure qualité (peut-être)
55€ de loyer de magasin, marketing, salaires français, et marge
Ce n’est pas de l’éthique. C’est du positionnement commercial.
Ma conclusion : à qui profite le crime ?
La suspension de Shein arrange :
Les marques françaises qui ne veulent pas admettre leur propre délocalisation
Les politiques qui peuvent montrer qu’ils « font quelque chose »
Les moralistes qui peuvent se draper dans l’éthique
Elle ne profite PAS :
Aux consommateurs qui n’ont toujours pas d’alternative abordable mais qui ont des risques
sanitaires à consommer de tels vêtements ou autres objets
À la planète qui supportent des risques environnementaux comme la pollution des terres et des
eaux (les clients iront sur Temu, Aliexpress, etc.)
Aux travailleurs de la chaîne textile, toujours plus exploités
À la transparence économique
Le vrai courage politique serait de dire :
- On réforme les règles douanières pour TOUTES les importations
- On oblige TOUTES les marques (françaises incluses) à afficher leur traçabilité complète
- On aide l’industrie française à créer une vraie offre intermédiaire (50-100€) et accessible
Mais ça, personne ne le fera. C’est plus simple de fermer Shein et de faire semblant d’avoir réglé le
problème.
Quel modèle serait alors viable en tenant compte que le pouvoir d’achat des francais est à terre
depuis des années? merci !!
Dans une optique d’industrie textile régénérative, voici ce qui pourrait être réellement viable : - Le modèle coopératif de production-distribution
Créer des coopératives de consommateurs qui commandent directement à des ateliers
français/européens en gros volumes.
Imaginons un modèle des AMAP, mais pour le textile. Vous « précommandez » votre garde-robe
saisonnière. :
50 000 adhérents payent 20€/an de cotisation
Ils commandent collectivement 2-3 collections par an
Suppression de tous les intermédiaires (showrooms, distributeurs, magasins)
Prix : jean de qualité à 60-80€ au lieu de 150€ - La « fast-fashion française » assumée
Le tabou à briser : Arrêter de prétendre que le Made in France doit être artisanal et cher.
Créer une chaîne de production industrielle française compétitive :
Usines robotisées et automatisées (réduction des coûts de main-d’œuvre)
Volumes importants (économies d’échelle)
Distribution en propre (Zara-style)
Objectif : t-shirt à 20-25€, jean à 70-90€
C’est faisable ? Oui. Des pays comme le Portugal le font déjà. La France a perdu ce savoir-faire
industriel mais pourrait le reconstruire avec des investissements public-privé. - Le modèle « seconde main organisé »
Les Français ont des armoires pleines de vêtements peu portés.
La solution : soutenir une infrastructure nationale de seconde main :
Plateformes locales de revente facilitée (soutien concret aux entreprises de l’ESS qui peinent à
endiguer les flux de dons de vêtements de très mauvaise qualité)
Soutenir les Ateliers publics de réparation (mieux subventionnés)
Créer un Label qualité « seconde main certifiée »
Résultat : Prix 30-70% moins cher que le neuf
Répond au pouvoir d’achat + écologie, sans culpabilisation.
- Le modèle « capsule wardrobe + location »
Pour qui : Classes moyennes qui veulent de la qualité sans le coût initial.
Avec un Achat de base : 10-15 pièces essentielles Made in France de très haute qualité (investissement
800-1200€), de la location mensuelle : 30€/mois pour 3-5 pièces tendance qui tournent et une garantie de
10 ans sur les pièces de base.
Les gens acceptent de payer plus cher si c’est durable et garanti. Un jean à 120€ garanti 10 ans =
1€/mois. - Le modèle « low-cost européen transparent »
Production Portugal/Roumanie/Pologne (salaires décents mais coûts maîtrisés)
Traçabilité totale avec la blockchain
Prix intermédiaires : 15-40€ pour un vêtement
Marges réduites, volumes compensateurs
Les consommateurs ne sont pas idiots. Beaucoup préféreraient payer 25€ un t-shirt européen plutôt que 8€
un t-shirt chinois si l’offre existait à grande échelle.
- Le modèle « subvention ciblée »
Radical mais efficace : L’État subventionne directement l’achat de vêtements durables pour les bas
revenus.
Chèque-vêtement de 200€/an pour les foyers sous un certain seuil
Utilisable uniquement sur des marques certifiées durables/éthiques
Coût : ~2 milliards d’euros/an (dérisoire comparé à d’autres dépenses publiques)
Effet : Rend le Made in France accessible + soutient la filière + impact écologique
- Le modèle « marque blanche nationale »
Concept : Créer une marque nationale de vêtements basiques :
Gérée comme un service public ou une entreprise à mission
Production France/Europe
Design minimaliste, qualité irréprochable
Prix coûtant + 15% de marge
Distribution dans des « magasins d’État »
Objectif : T-shirt basique blanc 12€, jean 55€, pull 35€.
Ce qui DOIT changer structurellement :
A. Fiscalité inverse
Actuellement, la TVA est identique sur un t-shirt Shein et Made in France
Avec une TVA réduite (à 5,5%) sur des vêtements durables certifiés, et une TVA majorée (à 30%) sur
la fast-fashion
B. Taxe carbone aux frontières
Une Vraie taxation des émissions transport + production, Shein paierait son vrai coût environnemental
C. Obligation de transparence
Toute marque doit afficher : lieu de production, composition, durée de vie estimée, coût carbone, ce qui
pourrait advenir avec l’affichage environnemental (insuffisant à ce jour et volontaire)
Fin du flou artistique
D. Réindustrialisation aidée
Prêts à taux zéro pour créer des unités de production textiles
Formation massive aux métiers du textile
Robotisation financée publiquement
La vraie révolution : changer le rapport au vêtement
Le modèle actuel repose sur l’hyperconsommation : acheter 50 pièces/an qu’on porte 2 fois.
Nous proposons un nouveau modèle viable : Acheter 15-20 pièces/an maximum, les
porter réellement (50+ fois), les réparer quand nécessaire, les revendre/donner ensuite
À pouvoir d’achat égal, quelqu’un qui achète 50 pièces Shein à 10€ (= 500€/an) pourrait acheter 8 pièces
de qualité à 60€ (= 480€/an) qui durent 5 ans au lieu de 1 an.
Le calcul est rentable. Mais il faut changer les mentalités.
Pourquoi ça n’existe pas encore ?
Parce que ça demande du Courage politique (affronter les lobbies de la distribution et du luxe), une
Vision à long terme (investissements lourds aujourd’hui, bénéfices dans 10 ans), un Changement
culturel (renoncer au fantasme de l’abondance infinie)
Mais en fait ça existe en partie déjà (Vinted pour la seconde main, quelques coopératives…), juste à l’état
embryonnaire et sans volonté politique de massification.
La vraie question n’est pas « est-ce viable ? » mais « qui a intérêt à ce que ça se fasse ? »
Et malheureusement, les acteurs qui ont le pouvoir (grandes enseignes, luxe, politiques) n’ont aucun
intérêt à ce modèle émergent.
C’est pour ça que fermer Shein est une fausse solution confortable : ça donne l’illusion d’agir sans rien
changer au système.
Merci Catherine !
Catherine Dauriac bio expresse:
Après ses études d’Archéologie précolombienne, Catherine Dauriac se consacre au textile et à la mode. Après 15 ans d’accompagnement de jeunes créateurs indépendants, elle entame en 2003 une carrière de journaliste autour de l’éthique dans la mode et la décoration. Aujourd’hui, rédactrice en chef adjointe aux impacts pour la revue papier Hummade, dédiée au vêtement dans son aspect politique, social, environnemental. Matières écologiques et responsabilité environnementale et sociétale sont ses sujets majeurs, dans ses articles, ses conférences et son livre Fashion – avril 22. Engagée auprès de Fashion Revolution France en 2015, elle est coordinatrice nationale depuis janvier 2020.
