
Maitre Emilie Vergne PHOTO DR
Les violences sexistes et sexuelles au travail prennent diverses formes : agissements sexistes, discriminations fondées sur le sexe, harcèlement moral, sexiste ou sexuel, violences physiques, agressions sexuelles, viols…
Ces violences concernent tous les milieux professionnels et tous les milieux sociaux.
Ces violences sont punies par la loi.
La 190ème convention de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) sur la violence et le harcèlement de 2019, définit, en son article 1, les violences de la manière suivante :
« a) l’expression «violence et harcèlement» dans le monde du travail s’entend d’un ensemble de comportements et de pratiques inacceptables, ou de menaces de tels comportements et pratiques, qu’ils se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, qui ont pour but de causer, causent ou sont susceptibles de causer un dommage d’ordre physique, psychologique, sexuel ou économique, et comprend la violence et le harcèlement fondés sur le genre;
b) l’expression «violence et harcèlement fondés sur le genre» s’entend de la violence et du harcèlement visant une personne en raison de son sexe ou de son genre ou ayant un effet disproportionné sur les personnes d’un sexe ou d’un genre donné, et comprend le harcèlement sexuel. »
Selon l’enquête Virage de l’Institut national d’études démographiques (INED) réalisée en mars 2020, 20 % des femmes et 15,5 % des hommes déclarent avoir subi au moins un fait de violence dans les 12 derniers mois au travail.
Les femmes déclarent le double de violences sexuelles au travail qui concernent 4 % d’entre elles contre 2 % des hommes mais également plus de violences physiques (2 % contre 1 % des hommes). Elles subissent également davantage d’insultes et de pressions psychologiques.
Les violences sexistes et sexuelles au travail ont des conséquences sur la santé physique et mentale des victimes, mais impactent aussi l’environnement de travail de l’ensemble des agents. Il est donc important de prévenir ces risques et de proposer pour les situations urgentes des réponses rapides aux victimes.
L’article L. 131-3 du Code général de la fonction publique ( CGFP ) précise qu’« aucun fonctionnaire ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».
La prévention des violences sexistes fait partie des mesures du plan santé au travail ( PST ) de la fonction publique, et notamment de l’axe 2 objectif 8 avec une action dédiée devant se traduire pas la présentation d’un plan d’action visant à « l’Approfondissement de la politique de prévention des violences internes et externes incluant les harcèlements et les violences sexuelles et sexistes ». Elle relève des 9 principes généraux de prévention (cf. page 46 du PST « Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, (…), ainsi que ceux liés aux agissements sexistes (…) ».
Mais si un cadre légal existe pour protéger les victimes ( notamment dans la fonction publique), le système patriarcal et une certaine mentalité figée ont du mal à se “mettre ” à niveau.
UFFP s’est entretenue avec Maitre Vergne pour parler de ce problème de société qui reste endémique et dont les conséquences psychosociales sont assez graves. Car les maltraitances et les violences que subissent les femmes dans le milieu du Travail peuvent nuire durablement jusqu’à amener des actes désespérés, si elles ne sont pas prises en compte à temps. Elle nous apporte ici son expertise juridique sur la question.
Entretien avec UFFP :
La violence de genre dans le milieu du travail : que prévoit la loi aujourd’hui ?
Les violences de genre ne relèvent pas d’un simple malaise ou d’un “climat tendu” : ce sont des atteintes à la dignité, sanctionnées par la loi, et dont l’impact sur la santé physique et psychique est bien documenté.
La loi française encadre strictement ces situations et interdit plusieurs types de comportements :
• Le harcèlement sexuel
(art. L.1153-1 C. trav. / art. 222-33 CP)
Il couvre trois réalités distinctes :
- Propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste
– blagues, gestes, regards, remarques sur le corps, propos intrusifs.
Un seul acte peut suffire s’il est grave. - Pressions dans un but sexuel
– le fameux “chantage sexuel”. - Ambiance sexiste ou sexualisante dégradante
– propos répétés et humiliants, climat hostile.
Le harceleur engage aussi sa responsabilité personnelle : ces faits peuvent être punis jusqu’à 2 ou 3 ans de prison et 45 000 € d’amende, voire davantage en circonstances aggravantes.
• Le harcèlement moral
(art. L.1152-1 C. trav.)
Il s’agit de comportements répétés qui détériorent la santé ou les conditions de travail :
- dénigrement,
- humiliations,
- isolement,
- pression permanente,
- retrait de missions,
- mise au placard.
• Les agissements sexistes
(art. L.1142-2-1 C. trav.)
Ce sont les comportements “banalisés” mais destructeurs :
- blagues sexistes,
- commentaires sur la tenue ou l’apparence,
- propos sur la maternité,
- remarques liées au sexe.
Ils sont souvent la porte d’entrée vers des violences plus graves.
• Les discriminations liées au sexe ou à la grossesse
Il s’agit de décisions défavorables parce qu’une personne est une femme, enceinte, mère ou supposée moins disponible.
Cela peut être un :
- refus de promotion,
- retrait de responsabilités,
- ralentissement de carrière,
- mise au placard après un congé maternité.
Ces discriminations peuvent être directes (propos explicites) ou indirectes (mesures apparemment neutres mais pénalisantes).
L’obligation de prévention et de protection de l’employeur
(art. L.4121-1 et s. C. trav.)
Depuis 1991 et renforcée par les réformes de 2012, 2015, 2018, 2021 et les mouvements #MeToo, l’employeur doit :
- prévenir (formation, information, affichage, sensibilisation),
- protéger immédiatement en cas de signalement,
- enquêter de manière sérieuse et impartiale,
- sanctionner les comportements fautifs,
- réparer les dommages,
- désigner des référents harcèlement (CSE et employeur pour 250+ salariés).
L’employeur peut être condamné même sans intention de nuire, s’il n’a pas assez agi pour protéger. Nous disposons d’un arsenal juridique riche et complet. Il convient aujourd’hui de l’exploiter. C’est toute la difficulté en réalité.
II. Il y a plusieurs types de violences. Quelles sont-elles et comment les prouver ?
Les violences de genre ou de harcèlement au travail peuvent prendre des formes très différentes. Certaines sont visibles, d’autres beaucoup plus subtiles. La loi les reconnaît toutes.
A. Les différents types de violences reconnues
1. Violences verbales
Elles incluent :
- insultes, remarques humiliantes,
- blagues sexistes, “humour” déplacé,
- critiques sur l’apparence, la tenue, la maternité, la voix, l’âge,
- injonctions stéréotypées (“sois souriante”, “tu es trop sensible”, “c’est l’hormonal”).
Ce sont souvent les premiers signaux d’un climat sexiste ou hostile.
2. Violences psychologiques
Ce sont les plus difficiles à identifier, mais elles ont l’impact le plus fort :
- humiliations répétées,
- mise à l’écart progressive,
- isolement,
- surveillance excessive,
- dénigrement en réunion,
- critiques floues impossibles à contredire,
- infantilisation,
- gaslighting (“tu inventes”, “tu exagères”).
Elles dégradent profondément la santé mentale.
3. Violences sexuelles et sexistes
Il peut s’agir :
- d’attouchements, gestes déplacés, contacts non sollicités,
- de demandes insistantes,
- de pression ou de chantage sexuel,
- de propos sexualisants récurrents,
- d’une ambiance sexualisée imposée.
En matière de harcèlement sexuel, un seul acte peut suffire lorsqu’il est grave.
4. Violences économiques ou professionnelles
Souvent invisibles mais juridiquement recevables :
- retrait de missions,
- pression pour accepter des horaires pénalisants,
- baisse injustifiée des responsabilités,
- refus d’évolution après un congé maternité,
- sanctions déguisées,
- précarisation indirecte (baisse des primes, objectifs irréalisables).
Ces violences visent à “casser” la position professionnelle.
5. Violences discriminatoires
Décisions défavorables fondées sur :
- le sexe,
- la grossesse,
- la maternité,
- la parentalité,
- ou des stéréotypes associés aux femmes (“moins ambitieuse”, “moins disponible”).
Ces discriminations sont illégales, même lorsqu’elles sont “habillées” en raison professionnelle.
6. Violences physiques
Plus rares en entreprise mais possibles :
- bousculades,
- gestes brutaux,
- agressions.
Ces faits relèvent immédiatement du pénal.
B. Comment prouver ces violences ?
La règle centrale est simple : La preuve est libre. La victime n’a pas à apporter une preuve parfaite.
Elle doit uniquement fournir des éléments laissant supposer le harcèlement.
Ensuite, c’est à l’employeur de se justifier.
Cette inversion de la charge de la preuve est prévue par le Code du travail et confirmée par la jurisprudence.
Éléments pouvant être utilisés comme preuve :
1. Écrits professionnels
- mails,
- SMS,
- messages internes (Teams, Slack, WhatsApp),
- messages vocaux.
Tout écrit peut devenir une preuve.
2. Captures d’écran
Pour les propos sexistes, humiliants, dénigrants, groupes internes toxiques, réseaux sociaux privés…
3. Documents RH
- évaluations,
- sanctions,
- changements de poste,
- retrait de missions,
- organigrammes modifiés,
- feuilles de route,
- badgeages montrant des pressions horaires.
Cela constitue un faisceau d’indices.
4. Attestations
Données par :
- collègues,
- anciens salariés,
- témoins,
- délégués du personnel.
Même si les témoins ont peur, une attestation peut être rédigée sobrement.
5. Certificats médicaux
Très importants dans les violences psychologiques :
- troubles anxieux,
- insomnies,
- somatisations (eczéma, migraines, troubles digestifs),
- burn-out,
- arrêts de travail.
La santé est un indicateur objectif du harcèlement.
6. Main courante ou dépôt de plainte
Même si la plainte n’aboutit pas immédiatement, elle constitue une preuve datée du vécu, utile en prud’hommes.
7. Enregistrements audio ou vidéo
Ils peuvent être admis s’ils sont indispensables au droit à la preuve et proportionnés (jurisprudence récente).
Ce n’est pas automatique, mais de plus en plus accepté, notamment face à des violences graves.
En matière de harcèlement sexuel, la loi est claire : Un seul acte grave suffit : geste, propos explicite, pression sexuelle.
En matière de harcèlement moral, les faits doivent être répétés mais pas forcément nombreux : Deux ou trois faits suffisent s’ils sont graves et répétés.
III. Pourquoi tant de femmes se taisent ? (Prisme juridique et PNL)
Il est essentiel de comprendre que la majorité des femmes ne se taisent pas par choix, mais parce qu’elles sont confrontées à des mécanismes psychologiques, sociaux et professionnels extrêmement puissants.
Et pour bien répondre à cette question, il faut distinguer le regard juridique de l’accompagnement PNL, qui interviennent à deux niveaux différents et complémentaires.
A. En tant qu’avocate : les raisons objectives, juridiques et systémiques du silence
Dans les dossiers que je traite, les femmes ne parlent pas parce qu’elles sont confrontées à un ensemble de facteurs très concrets :
1. La sidération
C’est un mécanisme de survie : face à un choc, le cerveau “gèle”.
La victime ne réagit pas, non par choix, mais parce que son système nerveux se protège.
2. La peur des représailles
La crainte de perdre son emploi, d’être mise au placard, d’être discréditée ou isolée est immense.
3. La peur de ne pas être crue
Beaucoup d’entreprises protègent encore l’agresseur “performant” plutôt que la victime “gênante”.
4. La dépendance économique
Quitter un poste ou engager une action judiciaire est parfois trop coûteux ou trop risqué.
5. Le retournement de culpabilité
Les agresseurs, mais aussi certains managers, inversent subtilement les responsabilités :
“c’est toi qui exagères”, “tu l’as mal pris”, “tu es trop sensible”.
6. La honte
Honte d’avoir subi, honte d’être ciblée, honte d’être fragilisée.
B. Conseils juridiques concrets que je donne systématiquement
Le cadre juridique existe.
Encore faut-il donner à la victime les moyens d’agir en sécurité.
Voici les recommandations que je donne immédiatement :
Documenter (c’est la priorité absolue)
Tenir un journal factuel daté : faits, dates, heures, témoins, ressentis physiologiques.
Conserver toutes les preuves
Mails, SMS, messages, captures d’écran, documents RH, historiques de tâches, badges d’entrée/sortie.
En parler à un tiers de confiance
Un·e collègue, un membre RH, un représentant du personnel.
Consulter le médecin du travail
Il peut constater les répercussions sur la santé et déclencher une procédure d’alerte.
Solliciter un avocat
Pour sécuriser la stratégie, choisir le bon moment pour parler, et éviter les faux pas.
Ne jamais se lancer seule
Le silence protège l’agresseur, mais une action isolée peut aussi exposer la victime.
Le bon accompagnement change tout.
C. En tant que praticienne en PNL : les mécanismes invisibles qui enferment dans le silence
La PNL n’est pas du droit :
elle concerne l’expérience intérieure, la perception, le rapport à soi, les réflexes psychiques.
Elle permet de comprendre ce qui se passe psychologiquement chez la victime :
1. La sidération (neuropsychologique)
Le cerveau se déconnecte pour survivre.
On n’ose pas parler, parce qu’on n’est pas encore revenu “dans son corps”.
2. La dissociation
Impression d’être spectatrice de sa propre vie.
La victime ne sait plus comment réagir.
3. La confusion entretenue par le harcèlement
Le gaslighting, la manipulation subtile, les humiliations voilées brouillent la perception.
4. La perte de repères
La frontière entre normal et anormal devient floue.
5. L’érosion de l’estime de soi
Plus la violence dure, plus la victime doute d’elle-même, de son vécu, de sa légitimité.
D. Travail PNL que je mène pour libérer la parole
Dans un cadre strictement séparé de la procédure, je travaille avec les victimes :
sur la reprise de contrôle,
sur l’ancrage pour stabiliser le système nerveux,
sur la légitimation des ressentis,
sur la transformation de la culpabilité imposée en responsabilité retrouvée,
sur la capacité à poser des limites saines,
sur la posture intérieure, indispensable pour se sentir à nouveau légitime.
Une femme qui se sent à nouveau “présente à elle-même” reprend immédiatement du pouvoir.
E. Une précision déontologique importante : les deux accompagnements sont distincts
- L’accompagnement juridique est strict, fondé sur le droit, la preuve, la stratégie, et encadré par la déontologie du barreau.
- L’accompagnement PNL se fait dans un cadre séparé : associatif, personnel ou relationnel, jamais en interférence avec la procédure.
Les deux ne se confondent pas. Ils se complètent.
F. Comment la PNL renforce la rédaction juridique (sans jamais la remplacer)
Un courrier d’avocat est un acte de communication stratégique. Et dans ce cadre, la PNL est un outil précieux pour :
- rendre les écrits plus clairs et plus lisibles,
- adapter le niveau de fermeté selon les profils psychologiques,
- anticiper les réactions adverses,
- éviter les formulations vulnérables,
- structurer un récit crédible et solide,
- produire une mise en demeure à l’impact maîtrisé,
- sécuriser la posture de la victime dans l’écrit. La PNL ne remplace jamais la loi.
Elle optimise la manière de la présenter. Elle renforce la force du droit sans jamais prendre sa place.
Les femmes ne se taisent pas parce qu’elles sont faibles.
Elles se taisent parce qu’elles ont peur, parce qu’elles sont sidérées, parce qu’elles veulent survivre.
Le rôle du droit, et le rôle de l’accompagnement humain, est de leur rendre la sécurité nécessaire pour que leur voix puisse enfin se déployer.
IV. Si le cadre juridique existe, pourquoi cela ne suffit-il pas ?
Parce que la loi ne peut pas compenser :
- la réalité économique,
- les ancrages culturels,
- la peur de “gâcher sa carrière”,
- la culture d’entreprise,
- le manque de formation des managers,
- les processus insidieux et invisibles : gaslighting, humiliation subtile, infantilisation,
- les problèmes de preuve,
- la loyauté interne mal positionnée.
La loi est un outil.
Sa mise en œuvre dépend de l’humain, du courage qu’on peut mobiliser et du système dans lequel on évolue.
V. Le patriarcat complique-t-il la défense malgré les lois ?
Oui, car les lois évoluent plus vite que les mentalités.
On le constate :
- dans certains hémicycles,
- dans certains discours politiques et médiatiques,
- dans les prétoires,
- et dans la banalisation de comportements sexistes.
Même dans le milieu juridique, des propos sexistes persistent.
Alors, dans les milieux non juridiques, l’écart est parfois plus grand encore.
VI. Pourquoi tant de victimes doivent-elles partir ?
Parce que :
- la hiérarchie est forte,
- la dépendance économique est réelle,
- les preuves sont difficiles,
- les dirigeants hésitent à agir sans preuve “parfaite”,
- et la peur de représailles est immense.
Partir n’est jamais une fuite.
C’est parfois un acte de survie psychique pour protéger sa santé et sa dignité.
VII. Quels sont les recours si rien ne change ?
Lorsqu’une situation de harcèlement, de violences sexistes ou de discriminations persiste malgré les signaux lancés, la victime n’est jamais démunie. Le droit du travail et le droit pénal offrent une palette de recours gradués, qui permettent d’agir rapidement ou dans la durée.
Voici les principaux leviers possibles :
1. Consulter un avocat : sécuriser la stratégie avant toute démarche
C’est souvent la première étape.
Un avocat permet :
- d’analyser précisément les faits,
- d’évaluer le niveau de gravité juridique,
- de structurer les preuves,
- d’éviter les erreurs qui pourraient se retourner contre la victime,
- de choisir le bon moment pour agir,
- d’élaborer une stratégie globale (interne + administrative + judiciaire).
Cette étape évite les démarches impulsives, les signaux mal formulés, ou les plaintes incomplètes.
2. Alerter les représentants du personnel (CSE)
Le Comité Social et Économique dispose de pouvoirs spécifiques en matière de harcèlement :
- droit d’alerte,
- possibilité de déclencher une enquête interne,
- rôle de médiation,
- accompagnement dans les démarches.
Le CSE peut obliger l’employeur à réagir immédiatement.
3. Saisir l’inspection du travail
L’inspecteur du travail peut :
- constater les faits,
- auditionner des salariés,
- interroger l’employeur,
- mettre en demeure l’entreprise d’agir,
- transmettre le dossier au procureur en cas d’infraction.
Son intervention est particulièrement utile lorsque l’entreprise ne joue pas son rôle.
4. Demander une enquête interne sérieuse et impartiale
L’employeur a une obligation légale de lancer une enquête lorsqu’il existe un doute raisonnable.
Une enquête interne doit :
- être confiée à une personne neutre,
- être menée rapidement,
- respecter la confidentialité,
- donner lieu à un rapport écrit.
Un avocat peut aider la victime à cadrer sa demande pour éviter les enquêtes “fictives” ou tronquées.
5. Agir en référé : obtenir des mesures d’urgence
Le juge des référés peut intervenir immédiatement lorsque la situation est grave, par exemple pour :
- suspendre une sanction abusive,
- protéger la santé de la victime,
- faire cesser un trouble manifestement illicite,
- obliger l’employeur à enquêter ou à réorganiser le poste.
C’est un recours rapide, efficace, et parfois vital.
6. Saisir le Conseil de prud’hommes
C’est l’action classique en cas de :
- harcèlement moral,
- harcèlement sexuel,
- violences sexistes,
- discrimination,
- licenciement ou rupture forcée.
La victime peut demander :
- la reconnaissance des faits,
- des dommages-intérêts,
- la nullité d’une sanction,
- la résiliation judiciaire du contrat,
- ou la réintégration (dans certains cas).
Les montants peuvent être très significatifs.
7. Déposer plainte pénale
C’est indispensable lorsque les faits sont graves :
harcèlement sexuel, agression sexuelle, violences, menaces, chantage.
La plainte peut être :
- simple (commissariat/procureur),
- ou accompagnée d’une constitution de partie civile pour ouvrir automatiquement une enquête.
Le volet pénal est souvent un levier puissant face à des entreprises défaillantes.
8. Demander des mesures de protection
Dans les cas les plus sévères, la loi permet :
- l’éviction temporaire du harceleur,
- l’éloignement hiérarchique,
- la modification du poste,
- la mise en place d’un protocole de sécurité.
Ces mesures peuvent être obtenues en interne, en référé, ou dans le cadre d’une instruction pénale.
9. Consulter des professionnels de santé
Le médecin du travail, le médecin traitant ou un psychologue peuvent :
- constater les conséquences sur la santé,
- appuyer la demande d’aménagement du poste,
- déclencher une alerte,
- prescrire des arrêts,
- constituer des pièces médicales précieuses pour la procédure.
Les certificats médicaux ont un rôle probatoire central.
10. Parfois, quitter l’entreprise est un acte de survie
Dans certaines situations extrêmes, partir n’est pas un échec :
c’est un acte de protection psychique et parfois physique.
La victime peut envisager :
- une rupture conventionnelle,
- une prise d’acte,
- une résiliation judiciaire,
- une reconversion,
- ou simplement la mise à distance nécessaire pour se reconstruire.
Le départ peut être juridiquement encadré pour préserver les droits de la victime.
Les recours existent, nombreux et complémentaires.
L’enjeu n’est pas seulement de “parler”, mais de parler au bon moment, dans un cadre sécurisé, avec une stratégie solide.
Une victime n’est jamais démunie : elle a des droits, des options, et des leviers. C’est le rôle du droit de les lui rendre accessibles.
VIII. Les boutades politiques sont-elles révélatrices d’un problème latent ?
Oui.
Elles révèlent un biais culturel persistant : la loi avance, mais certains discours publics restent banalisants ou minimisants.
Ce n’est pas forcément un manque de volonté politique globale, mais un manque de cohérence entre :
- les discours,
- les budgets,
- les moyens,
- la formation,
- et les pratiques réelles.

Qui est elle ?
Maître Émilie Vergne est avocate au Barreau de Paris, installée dans le 16ᵉ arrondissement et intervenant dans toute la France. Depuis 12 ans, elle exerce en droit pénal, droit civil (famille, consommation, responsabilité civile, immobilier) et droit des affaires, aussi bien en conseil qu’en contentieux.
Sa pratique se distingue par une approche à la fois juridique, stratégique et profondément humaine. En complément de sa formation d’avocate, elle est également formée en communication non violente, écoute active, PNL, gestion du stress, ainsi qu’en détection des mensonges et de la vérité.
Elle mobilise ces outils pour optimiser la communication entre ses clients et leurs interlocuteurs, préparer efficacement les négociations et audiences, repérer les incohérences ou stratégies adverses, et sécuriser les orientations juridiques — notamment en contexte d’emprise, de manipulation ou de violences.
