Dr Najat Maalla M’jid, est Experte Internationale dans le domaine des Droits de l’enfant. Elle est l’auteur de nombreux articles et rapports sur la situation des enfants et de leurs droits dans de nombreux pays et a participé à l’élaboration de politiques nationales de protection de l’enfant au Maroc, et dans plusieurs autres pays.
Elle a occupé la fonction « Rapporteure spéciale des Nations unies sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants » , de mai 2008 à Juin 2014 .
Mme Najat Maalla M’jid est également Professeur-enseignant dans les universités marocaines et internationales dans le domaine des Droits de l’enfant.
Dr Najat Maalla M’jid est médecin pédiatre de formation et a géré pendant une dizaine d’années une clinique mère enfants au Maroc. Elle est impliquée depuis une trentaine d’années dans les questions des Droits de l’Enfant. Elle est la fondatrice de l’ONG marocaine de BAYTI, pionnière au Maroc dans le domaine de prise en charge et la réinsertion des enfants vivant et travaillant dans la rue.
Elle est membre du Conseil National marocain des Droits de l’Homme et de plusieurs organisations non-gouvernementales et de réseaux internationaux de défense des droits des enfants. Elle a reçu de nombreux prix internationaux dédiés aux droits de l’enfant.
Elle vient d’être nommée par le Secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, en tant qu’experte avec six autres confrères, au sein du Comité consultatif de la société civile sur la prévention de l’exploitation et des abus sexuels.
La création de ce Comité viserait à améliorer la réaction de cette organisation mondiale contre l’exploitation et les abus sexuels. Son objectif étant de favoriser une interaction plus étroite entre la société civile et des experts et organisations externes.
Nous avions eu le bonheur de partager avec elle le débat d’ouverture du réseau WIMEN à Casablanca en janvier dernier. L’occasion de parler de leadership mais aussi et surtout de vocation.
UFFP vous fait découvrir cette femme admirable qui a accepté de répondre à nos questions.
Entretien Express:
Votre vie ce sont des choix et surtout des convictions ? oui je peux dire aujourd’hui, que mon parcours est surtout un vécu intense avec des enseignement et surtout des émotions.Je ne suis plus toute jeune, j’ai 59 ans, je suis grand-mère d’une petit Aylan qui a illuminé ma vie . Très jeune, dès l’âge de 8 ans je rêvais de devenir médecin, afin de soigner et aider les personnes malades et notamment les enfants; devenir une femme indépendante et autonome, qui décide par et pour elle-même; et surtout contribuer à la société dans laquelle je vivais et vis. Je n’avais pas envie d’une vie banale, routinière mais j’avais envie de m’engager à l’instar de mes idoles, Dr Albert Schweitzer, Nelson Mandela, Martin Luther King. Dès le lycée et durant tout mon cursus universitaire, tant au Maroc, qu’en France, j’ai fait du bénévolat dans des associations prenant en charge des enfants et des jeunes garçons et filles en difficulté. Une fois de retour dans mon pays avec le diplôme de médecin pédiatre en poche, j’ai travaillé dans des structures hospitalières où j’ai occupé les fonctions de chef de service de pédiatrie et de médecin directeur d’une structure mère-enfant.
Une femme engagée mais dans un milieu masculin?
Seule femme médecin directeur, parmi 13 hommes. Amener un nouveau style de management qui se veut participatif, transparent et basé sur les résultats, n’a pas été facile. Mais je me suis accrochée, bataillée pour faire de l’accès aux enfants et aux mères à des soins humanisés et de qualité, une réalité. Parallèlement à ce métier prenant, et tout en exerçant mon rôle de mère, j’ai continué mon militantisme sur les droits des enfants, en travaillant bénévolement au sein d’associations.
Comment est née l’Association Bayti ?
Et en 1995, indignée et révoltée par la situation des enfants dans les rues, j’ai fondé Bayti, première association marocaine dans ce domaine.
Un travail de longue haleine ? Absolument. Ce travail acharné et de longue haleine a permis d’obtenir des résultats notables : réformes des lois, accès aux services sociaux, et structures d’accueil pour ces enfants. Des centaines d’enfants, filles et garçons ont ainsi réaliser leur projet de vie , étudier, accéder à l’université, l’emploi ; Mais tout n’est pas encore gagné.
Vous rencontrez encore des lenteurs et des défis s’agissant de l’enfance? oui, il existe toujours des discriminations et des violences à l’égard des enfants qui justifient la poursuite de ce combat, que je mène non seulement à travers l’association , mais également à travers le CNDH, dont je suis membre depuis 2002. En 2008, j’ai été nommé Rapporteur Spécial des NU sur la vente, la prostitution et la pornographie affectant les enfants. J’ai exercé ce mandat qui est bénévole et indépendant pendant 6 années, durant lesquelles, j’ai visité une vingtaine de pays pour évaluer la protection des enfants et de leurs droits et interpeller publiquement lors des sessions du CDH, les gouvernements concernés.
Si vous aviez à faire un retour en arrière, quelles sont les expériences qui vous ont le plus touchée ? De beaux moments : accompagner des enfants qui étaient exclus, qui étaient victimes de violence et de discrimination , croire en elles et eux, les voir réaliser leurs rêves et devenir des jeunes femmes et hommes indépendant(e)s, épanouies . Des moments difficiles : des enfants en très grande souffrance, tellement dépendants de la rue et de l’errance, qui n’arrivent plus à se projeter, qui ne croient plus en rien et ce malgré un accompagnement intensif.
Parlez nous de votre Association Bayti
L’association Bayti est la première association marocaine à travailler avec les enfants en situation de rue, créée il y’a 23 ans . Bayti écoute, protège, accueille, accompagne, éduque, soigne, afin que chaque enfant puisse réaliser son propre projet de vie et ce grâce à des équipes formées et motivées, qui sillonnent les rues, qui sont dans les structures d’accueil et d’hébergement et dans la ferme-école, qui travaillent également avec les familles ( biologiques, élargies, et d’accueil) en vue de renouer les lien familiaux , apporter une guidance parentale et offrir un environnement protecteur des enfants . Bayti c’est aussi le plaidoyer pour la promotion et la défense des droits des enfants .
Vous avez fait référence à Hessel, qu’ est ce qui vous indigne le plus s’agissant de ce monde ?
J’ai toujours baigné dans les valeurs de justice et d’équité sociale, inculqués par mes parents. J’ai toujours refusé le fatalisme. Je m’indigne et me révolte devant toute injustice, la HOGRA, l’INDIFFERENCE , la BANALISATION ET LA TOLERANCE SOCIETALE GRANDISSANTE devant la VIOLENCE et l’EXCLUSION DES ENFANTS !
Parlez nous de votre expérience à WIMEN ?
Je ne suis pas membre de Wimen, mais j’encourage très fortement cette initiative.
Merci Najat MJID !