Bien sûr, les Femmes Africaines sont plurielles : diversité ethnique, culturelle, religieuse. Mais, quand il s’agit de leurs droits, elles se ressemblent.
Et, unies dans un même combat, elles pourraient même se rassembler : l’Afrique de la relève, l’Afrique de l’émancipation et de la parité. Une bataille longue et laborieuse, une bataille nécessaire qui nous demande toutes de la faire en rang uni aujourd’hui alors que nous entrons dans le siècle des incertitudes !
Quelques faits
Les inégalités persistantes entre les sexes et les violences contre les femmes constituent donc des freins à la réalisation des Objectifs du millénaire pour le développement.
Les femmes africaines n’ont pas la partie facile bien qu’elles soient les premiers agents économiques et sociaux du continent noir.
Aujourd’hui en effet, ce sont les femmes qui détiennent les principaux leviers de commande en Afrique.
Et c’est là tout le paradoxe du statut de la femme africaine : de la réalité invisible ou ignorée à l’absence de reconnaissance. Car il existe une grande disparité entre les objectifs, certes ambitieux mais humainement incontournables et les moyens financiers, logistiques et humains accordés pour atteindre ces objectifs.
Il est reconnu par toutes les études menées par les Organisations Internationales qu’en Afrique les femmes sont véritablement un moyen efficace de « réduire la pauvreté, d’augmenter la croissance économique et accélérer la réalisation de tous les objectifs du millénaire pour le développement (OMD).
Mais ce monde, dominé par un machisme outrancier bien qu’en forte perte de vitesse, fera bientôt place à une société « maternelle », plus juste, plus humaine, plus saine. Et qui peut encore dire que l’Afrique n’est pas l’avenir du Monde ?
Cependant, avant d’atteindre ce but, il reste beaucoup d’épreuves, beaucoup d’obstacles à passer. Et comme le disait Mme Farkhonda Hassan, de la Commission économique de l’ONU pour l’Afrique « L’objectif actuel n’est pas de renégocier nos rêves, mais de souligner la responsabilité de tous les intervenants … Nous ne cherchons plus à obtenir des promesses, mais nous exigeons des actes.”
Les Africaines dans l’histoire à aujourd’hui
Dans l’histoire antique, les femmes Africaines ont régné. Y compris des femmes « noires » dans des civilisations réputées « blanches » telles que l’Egypte.
Le Soudan, en l’occurrence, a donné naissance à la civilisation pharaonique. Beaucoup d’archéologues ont démontré de nombreux liens « génétiques » entre le Soudan ancien (c’est-à-dire Koush) et l’Égypte antique (c’est-à-dire Kémèt). L’étymologie du mot « Soudan » relevée à partir des textes hiéroglyphiques et coptes eux-mêmes signifiait dans l’Antiquité « Roi » ou « Reine » d’Égypte. Et dans la Civilisation de l’Égypte antique « régnaient les pharaons noirs ».
Aujourd’hui, la situation des femmes est peu enviable, bien que certains chiffres soient surprenants (voir annexe) : par exemple, le Rwanda est le pays ou la proportion de femmes au sein des assemblées parlementaires est le plus élevé (plus de 55%), et la Tunisie arrive en 8ème position avec 23%, bien devant la France ou les USA.
Bien sûr, d’une Afrique à l’autre, la situation des femmes n’est pas la même :
En Afrique subsaharienne, elles subissent encore les effets de certaines coutumes (polygamie, mutilations génitales… et une conjoncture socio-économique défavorable) et malgré l’existence de textes en faveur de leur émancipation, leurs droits ne sont pas pris en compte. Les disparités, on les retrouve principalement dans le droit à l’éducation et à la formation, le droit à la santé, à la justice des femmes.
Mais les mentalités évoluent :
-des femmes ont été élues Présidentes de la République, comme ce fut le cas au Libéria avec Ellen Johnson Sirleaf.
-des femmes ont reçu le Prix Nobel de la Paix comme Wangari Muta Maathai
-des femmes sont des leaders de l’économie, comme Evelyne Tall qui est Directeur général adjoint du Groupe Ecobank
Dans le Maghreb, certains pays comme la Tunisie où le Maroc ont enregistré des avancées nettes sur le plan social et juridique. Dans ces pays, la femme a une place importante dans l’économie.
C’est notamment le cas pour la Tunisie qui est un modèle pour l’Afrique et le Monde Arabe ; les femmes y ont obtenu des acquis grâce au code du Statut personnel en 1956 qui a donné droit et parité à la tunisienne. Et bien heureusement ce statut a été conforté très récemment lors de l’approbation de la nouvelle constitution par l’Assemblée Constituante qui a été convoquée après la Révolution de Jasmin.
Le code du statut personnel acquis aux lendemains de l’indépendance en 56 a été le code libérateur de la femme tunisienne,: il s’agit d’une série de lois progressistes et inédites en Afrique et dans le monde arabe. Il instaure l’égalité, abolit la polygamie, crée une procédure judiciaire pour le divorce et n’autorise le mariage qu’avec consentement mutuel des deux conjoints. L’avortement et la contraception sont également légalisés. Toutes ces mesures avant-gardistes s’inscrivent dans une volonté de modernisation du pays! Et malgré les pressions islamistes de certaines mouvances conservatrices, la femme tunisienne est une actrice de premier plan dans le tissu socioéconomique tunisien. Aujourd’hui, le prix NOBEL 2015 qui a été conféré à quatre Associations de la Société civile tunisienne dont à une Femme, prouve que la femme est le pilier d’un développement durable équitable.
Au Maroc : le processus a été plus long, mais il connaît aujourd’hui un grand essor grâce à la volonté politique du souverain Mohamed VI et la « Moudawana » qui consacre le droit des marocaines. La société civile est de plus en plus propice à l’émergence d’une pensée féminine et on compte sa présence à plusieurs niveaux : législatif, politique, et culturel. C’est surtout dans les domaines de la création culturelle qu’elle soit artistique ou littéraire que l’on mesure l’importance de la femme marocaine, l’artiste peintre Chaibia, les universitaires Fatima Mernissi, Ghita El Khayat, Aziza Bennani et bien d’autres. Cependant on observe un net recul de la présence de la femme marocaine dans les instances politique depuis l’hiver arabe.
Une Campagne pour faire avancer les choses
Diverses initiatives ont pris forme pour sensibiliser l’opinion publique à ce sujet. Les femmes africaines doivent cesser d’être le maillon faible de la chaine : le 8 mars 2009, avait été célébré la journée internationale de la femme et plus d’une centaine d’organisations, présentes sur tout le continent africain, lancèrent une campagne de sensibilisation et de revendication dans le but d’inciter les Etats à respecter et faire respecter les droits des femmes en Afrique. A cette occasion, dans une quarantaine de pays, avaient été organisées des marches, des manifestations, des ateliers à destination des médias et des autorités, des émissions de radio et de télévision. Cette campagne très importante, visait à obtenir des Etats africains qu’ils ratifient l’ensemble des textes internationaux et régionaux relatifs à la protection des droits des femmes – le Protocole à la Charte africaine relatif aux droits des femmes et le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) – et qu’ils respectent leurs obligations en droit et en fait.
Depuis ces actions ont débouché sur quelques acquis: la ratification par la Guinée Bissau du Protocole facultatif à la CEDAW, l’adoption d’une loi sur le quota de représentation des femmes sur les listes électorales au Burkina Faso, l’entrée en vigueur d’une loi sur les mutilations génitales féminines en Ouganda et la nomination d’une représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies sur les violences sexuelles dans les conflits armés.
Là encore, les femmes africaines ont su faire entendre leur voix et obtenu des résultats qui se révèlent être des grands pas pour l’humanité.
Conclusion :
La lutte des femmes africaines à l’heure actuelle, doit déboucher sur la reconnaissance de leurs droits politiques et des principes d’égalité des sexes. Au lendemain des indépendances, les textes constitutionnels affirmant ces principes étaient nombreux mais entre le discours et le terrain, il y a un gouffre. Aujourd’hui, le constat est que les textes internationaux et les multiples conférences internationales à ce sujet ne peuvent avoir un effet que s’il y a une réelle volonté politique. Le problème des droits des femmes en général est avant tout un problème de développement. Les textes législatifs nationaux ne suffisent pas.
La question que l’on doit se poser c’est : comment les africaines peuvent-elles prendre part de manière plus efficace à la gestion des affaires publiques si leur premier objectif est la survie ? Chaque fois que les femmes ont pu se faire entendre, c’est parce qu’elles étaient indépendantes économiquement. La question des droits politiques des africaines ne peut être séparée des autres droits et libertés permettant une amélioration de leurs conditions de vie en général. Il y a véritablement une corrélation entre l’échec du développement et l’exclusion des femmes. Aujourd’hui, ce combat mené par les instances internationales et les ONGS, se doit d’être relayé par les Médias. L’Afrique des droits des femmes est une réalité à construire et il nous incombe de redevenir « Reines d’Afrique »
ANNEXE
Quelques chiffres sur les discriminations sur les femmes africaines
Les seuls pays qui garantissent l’égalité entre hommes et femmes dans la loi sont le Cap-Vert, l’Afrique du sud, le Bénin.
Mutilation génitales féminines(MGF)
Guinée-Conakry – 96% des femmes ont subi une forme de MGF (2005)
Djibouti – 93% des femmes ont subi une forme de MGF (2008)
Mariages précoces et forcés
Cote d’Ivoire – plus d’un tiers des femmes sont mariées avant 18 ans
Mali – 71% des femmes sont mariées avant 18 ans
Santé
Sierra Leone – plus fort taux de mortalité maternelle du monde (2 000 décès pour 100 000 naissances en 2005)
Ethiopie – seules 10% des naissances se font avec l’assistance de personnel qualifié
Zimbabwe – taux de prévalence du SIDA chez les femmes entre 15 et 24 ans: 11,25%
Education
Tchad – seules 5% de jeunes filles dans l’éducation secondaire
Représentation politique:
Rwanda – 56.3% de femmes au parlement (rang mondial: 1)
South Africa – 44.5% de femmes au parlement (rang mondial: 3)
Congo Brazzaville – 7.2% de femmes au parlement (rang mondial: 120)
Tchad – 5.8% de femmes au parlement (rang mondial: 126)
Cette petite reflexion ne prétend pas être complète mais elle amorce les prémisses de notre prochain ouvrage sur les femmes, so stay tuned !