KINDIA : Destins croisés
Un documentaire à la croisée des chemins
Par Supa Djiles
Kindia commence sur la vision d’une mangrove dévastée. On découvre rapidement pourquoi. A cause du sel. Il est Guinéen mais on l’appelle « le Sénégalais ». Il récolte du sel pour nourrir ses dix enfants. Pour fabriquer le sel, la technique c’est de faire bouillir la saumure pour que le sel se cristallise. 24 heures sur 24, le feu dois être alimenté. Il lui faut donc du bois et donc lui-même, sa femme ou ses enfants vont couper tout ce qui se trouve autour. Au final La petite famille déforeste tranquillement et avec le sourire tout ce qu’elle trouve dans la mangrove asséchées sur plus d’un kilomètre de circonférence.
Tous les ans et ils ne sont pas les seul. Il faut 15 tonnes de bois pour produire une tonne de sel. De plus les vapeurs du procédé sont toxiques et réduisent d’environ dix ans l’espérance de vie du producteur. Au caméraman au « Sénégalais » qui lui demande si il a conscience de ses actes pas très écologique il réponds : »Tu a une autre solution ? ». Pourtant, oui, il y en a une qui vient d’Univers Sel, une association Humanitaire qui a déjà œuvré dans ce domaine qui a déjà travaillé notamment au Bénin et qui a créé un système très simple à base de bâches plastiques qui permet de produire du sel avec uniquement l’évaporation due au soleil . Moins de travail, plus besoin de bois et du sel de meilleure qualité plus fort en iode. Voila, c’est un des exemples d’ingéniosités et une réponse a une problématique résolue grâce à l’humanitaire et au transfert de compétences.
Kindia 2015 est un documentaire produit par Canal plus qui sera diffusé pour la première fois le 20 novembre prochain. L a chaine nous a habitué a beaucoup de créativité, depuis sa création , aujourd’hui elle tente un nouveau pari en s’impliquant dans l’humanitaire. Pas simplement en tant que diffuseur mais également comme le dit Christine Cauquelin, responsable des documentaires a Canal s »Sur trois pied avec un aspect filmique notre métier d’origine, un aspect partenaire avec des acteurs locaux et un aspect investisseur avec la création de Kindia+ ou nous abonderont l’équivalent sur chaque euro versé ». De plus la chaine s’engage jusqu’en 2015, d’où le nom du documentaire, à prolonger cette expérience. A la genèse du projet, Christine Cauquelin mais plus étonnamment le responsable du Zapping Canal : « Nous souhaitons nous installer dans un temps plus long que le temps télé, voir évoluer les choses ».
La guinée Conakry, touchée par l’histoire
La Guinée Conakry. A ne pas confondre avec la Guinée Équatoriale ou la Guinée Bissau. La guinée Conakry du nom de sa capitale c’est un des pays les plus pauvres de l’Afrique Sub Sharienne avec le Burkina Faso. Deux pays dont les dirigeants ont contrariés des présidents français. Le Burkina avec Thomas Sankara et la Guinée avec Ahmed Sékou Touré. « Nous préférons la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l’esclavage », avait lancé au général de Gaulle, en 1958 à Conakry, L’indépendance fut proclamée le 2 octobre 1958. La France n’y mit aucun obstacle mais retira dans le mois qui suivit son armée, ses fonctionnaires et ses crédits. La Guinée le paye encore, ayant ajoutée derrière 50 années de dictature. En terme économique, le PIB par habitant de la Guinée était de 448 dollars en 2010 (chiffres FMI), ce qui la place en 169ème position sur 179ème. A titre de comparaison, la même année, il était de 41.018 dollars pour la France. La Guinée fait donc partie des pays où les opérations de développement ont un réel impact.
C’est donc le cadre qu’a choisi Canal, qui avait choisi de tourner en Afrique. Pas à Conakry même, la Capitale mais a Kindia et ses environs. Kindia est une ville de Guinée située à 135 km de la capitale Conakry, c’est la que Canal +, plutôt que de suivre un projet va suivre plusieurs projets « humanitaires » dans les domaines de la santé, de l’éducation, de la production et de l’hygiène. Cet ensemble thématique nous offre un panorama de problématiques complexes et nous permets de suivre des hommes qui ont choisis de s’y attaquer. Pas de nouvelles associations, non mais des associations déjà présentes sur le terrain. Loin de la naïveté de on va tout changer tout de suite les gens vont tout accepter tout de suite ». Non, des gens d’un réalisme tranquille qui savent que le changement prend du temps et que pour transformer les choses il faut impliquer la population. La chaine a donc chois trois angles d’approche : La problématique elle-même, par exemple comment sauver une ville de ses déchets, pollueurs, vecteurs de maladies, quels sont les hommes susceptibles d’y remédier, et surtout comment impliquer la population. Les thèmes retenus, des thèmes primordiaux au développement, qui s’imbriquent et qui prouvent qu’une seule approche ne suffit pas. Encore une fois la clé c’est toujours l’éducation. Suivre des projet, mais surtout des êtres humains face a aux changements apportés par ces projets.
Un sociologue français divisait les hommes en trois catégories par rapport à la nouveauté: Les mutins qui refusent, les moutons qui suivent et les mutants qui intègrent immédiatement cette nouveauté. On voit dans ce documentaire ces trois typologies mais surtout des « mutants » qui comprennent l’intérêt de ces nouvelles techniques et connaissance apportées par les humanitaires. Ce sont aussi des humanitaires nouvelle génération qui cherchent des techniques, des biais, partagent les expériences pour trouver le meilleur moyen de convaincre.
Avec des moments très forts,et il y en a beaucoup notamment lorsque le responsable de l’UNICEF sur place, en charge de construire des écoles Julien Harneiss, retourne voir Madame Fari pour essayer de comprendre pourquoi elle a finalement accepté de mettre sa fille à l’école. Elle qui a besoin de ses enfants pour survivre et fabriquer de l’huile de palme qu’elle vent au marché. Au final, cette dame explique que ce n’est pas elle mais les deux grandes sœurs qui acceptent d’une certaine façon de sacrifier leur avenir pour leur petite sœur et leur petit frère pour qu’ils puisse accéder à une éducation qu’elles n’ont pas eu. Une génération qui se sacrifie pour une autre. Belle leçon de vie.
Canal plus à eu le nez fin, également dans la sélection des associations qui participent à ce projet et qui , signe de qualité, ont accueillis d’abord avec méfiance le projet. Des hommes d’expérience avec parfois des parcours singuliers comme justement Julien Harneiss, ce représentant de l’Unicef, Soldat, businessman, puis humanitaire qui a œuvré dans plusieurs pays Goma, dans l’Est de la République démocratique du Congo, au Liban et en Indonésie dans la zone et qui se retrouve en charge de construire des écoles et des programmes d’éducation. D’un flegmatisme a tout épreuve et d’une pudicité émouvante quand à ses sentiments. Des hommes exceptionnels donc.
L’humanitaire c’est forcément émouvant, car il y a humain et dans humain l’imprévisible. Kindia est une entreprise à taille humaine qui montre les victoires, les déceptions, les réussites, les échecs, les attentes. Ce « temps long » dont nous parlions au début permet effectivement de s’attacher à ces hommes et femmes réunis autour de ces projets. Humanitaires tout autant que guinéens. On a envie de tout vous raconter mais il faut laisser de la place à la découverte.
Kindia reste aussi avant tout un engagement, un pari sur l’avenir. 5 ans c’est long et tout peut changer du jour au lendemain quels que soient les précautions prises. On l’a vu au Mali. Pourtant ce choix de la longueur permet également aux images de mieux s’ancrer dans la mémoire car on garde ces personnages et ces destins longtemps en tête. Plus qu’un documentaire sur l’humanitaire en Afrique, c’est un documentaire sur l’entreprise humaine et ses obstacles. On ne peut que souhaiter longue vie a Kindia …première diffusion le 20 novembre sur Canal +. Ne manquez pas.