Avec les profonds bouleversements du printemps arabe, dans certains pays la place de la femme est encore en question non seulement dans la sphère publique, dans celui de ses droits; mais également dans la sphère entrepreneuriale. En Afrique du Nord, alors que dans des pays comme la Tunisie, elles étaient auparavant précurseurs dans l’entrepreunariat, les mouvances islamistes rétrogrades installées dans le vide constitutionnel de l’après réveil arabe, ont mis en berne leurs acquis juridiques. Dans d’autres pays comme le Maroc, paradoxalement, depuis la Moudawana, des efforts politiques et l’appui de la monarchie, leur ouvrent de plus en plus de portes dans les sphères publiques et entrepreneuriales. En Algérie on perpétue un statut quo.
Essma Ben Hamida ENDA ONG pour la microfinance. Basée en Tunisie. couvre la région MENA
Mais, c’est certainement dans les pays du Golfe que les challenges sont les plus grands face à une société restée très conservatrice et où la visibilité des femmes, la mixité et la parité dans le milieu de l’entreprise relèvent du tabou sociétal. Malgré les discours durant le dernier sommet OCDE MENA des délégations saoudiennes ou qatari ( la saoudienne représentée par un homme et non une femme, et la qatari qui a fait preuve d’un courage diplomatique, en disant qu’il y avait des avancées dans son pays) soulignant que la religion n’était pas un frein à l’entrepreneuriat féminin, nous ne pouvons que rester circonspectes, car l’emploi féminin dans la région reste très embryonnaire et les mentalités ne sont pas prêtes de changer, d’autant que la wahabisation de la région gronde.
Pourtant beaucoup de femmes à travers le numérique et les économies dites informelles font lever les préjugés. Mais est-ce suffisant pour nous de rester dans l’ombre pour pouvoir travailler? Faut il perpétuer cette discrimination à l’emploi sous couvert de respecter les traditions islam tiques pour autant ? Assurément non !
Meriem Bourguiba Laouiti et Al Joumhouri.
Le « Forum des femmes Chef d’Entreprise du Sud » tenu au siège de l’OCDE, ce mois de novembre dernier, a réuni des personnes du Nord et du Sud, du Monde arabe, toutes de bonnes volontés. Des experts, des chercheuses, des femmes dans le milieu associatif, des diplomates, des femmes chefs d’Entreprise, toutes venues parler de leurs expériences, à la rechercher d’idées et de mécanismes qui pourraient drainer des financements pour lancer des programmes capables de motiver l’entrepreneuriat au féminin dans la région. A rappeler que le Forum OCDE MENA des femmes Chefs d’Entreprise est la résultante de réunions qui sont tenues depuis 2007, date à laquelle les Ministres de la région participant au programme MENA-OCDE pour l’investissement ont approuvé la Déclaration sur la promotion de l’entrepreunariat des femmes dans la région MENA par laquelle ils s’engagent à poursuivre une approche de soutien ciblée et intégrée en vue d’accélérer le développement de entrepreneuriat féminin dans la région. Plus de 70 représentants de l’OCDE et de la région MENA issus du secteur public, du secteur privé et du milieu académique se sont concertés sur les différentes façons à travers lesquelles les économies de la région peuvent soutenir les efforts sur le développement du secteur privé par des politiques ciblées et des services de soutien aux entreprises pour les femmes entrepreneurs.
Cependant pour favoriser une croissance économique mondiale solide et soutenue, l’avancement du rôle de la femme est essentiel tant dans les pays de l’OCDE que dans d’autres pays. Alors que les femmes dans la région MENA font encore et toujours face à d’importants défis culturels et juridiques et que leur participation économique est la plus basse au monde.
Pour la région MENA, l’accroissement de la participation dans le marché formel du travail ainsi que dans les activités entrepreneuriales, des femmes est crucial pour la stabilité et le développement dans la région. Et pour les femmes, en période de transition politique, il est important de jouer un rôle dans la prise de décision politique et économique, car cela déterminera le futur de leur Nation. Bien que les réformes économiques en vue d’améliorer le climat des affaires – notamment l’accès à la finance, les échanges, la fiscalité, l’emploi ou la politique des salaires – soient à aborder en priorité, l’égalité des genres ne peut être mise de côté puisque ceci a un effet indéniable sur la compétitivité d’un pays. L’accès à l’information sur les questions de l’investissement et des finances, reste par ailleurs aléatoire pour les femmes, comment faire pour changer cette donne ?
Bochra Bel Hadj Hmida de Nidaa Tounes
C’est dans ce contexte que les experts d’Algérie, de Bahreïn, , d’Egypte, d’Irak, de Jordanie, du Liban, du Maroc, de l’Autorité Palestinienne, d’Arabie Saoudite, de Tunisie, du Yémen, de l’Association sud-africaine des femmes entrepreneurs, du Centre of Arab Women for Training and Research (CAWTAR), de l’OIT, de la BERD et de l’OCDE ont échangé sur :
• l’amélioration de l’accès des femmes aux services de soutien non-financiers ;
• le renforcement de l’accès des femmes aux marchés et à l’information ;
• la recherche sur entrepreneuriat et la collecte de données pour élaborer des politiques efficaces et informées.
Les thèmes de la rencontre de deux jours à Paris ont donc inclut l’inventaire des politiques, des institutions et des programmes soutenant l’entrepreneuriat féminin dans la région MENA. Il s’agissait d’étudier les moyens d’aller de l’avant pour soutenir entrepreneuriat et l’emploi des femmes dans la région MENA. L’accent avait également été mis sur l’importance des services de soutien non-financier aux entreprises, ce que les gouvernements et le secteur privé peuvent faire pour adapter des services à une clientèle féminine; l’amélioration de la recherche et la collecte de données ventilées par sexe ainsi que l’état d’avancement des pays de la région MENA et les domaines prioritaires à améliorer.
envoye-special-tunisie