Femmes violées en RDC : STOP au chantage de la honte !

  • By SLKNS
  • 30 novembre 2012
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La situation des femmes en RDC. est plus qu’alarmante, selon une récente étude publiée par The American Journal of Public Health, une forte augmentation des viols a été constatée en RDC, au rythme de 1152 femmes par jour, soit 48 femmes par heure en moyenne. Et à l’heure actuelle, la situation est des plus alarmante en RDC. UFFP en dégage les points forts, et a aussi voulu connaître l’envers du décor « sur le terrain « en s’entretenant avec Simona Pari, fonctionnaire international auprès de la Monuc à Goma. Cet officier sur le terrain est en charge des violences sexuelles à l’égard des femmes.

Un fléau historique

Les viols de guerre ont de tout temps existé dans l’histoire des conflits. On a longtemps considéré, que cela faisait parti « du butin » et que le vainqueur avait une réelle légitimité auprès de ces captives. Les guerres contemporaines, malheureusement n’ont pas dérogé à la règle, et la violence à l’égard des femmes a grandi, on se rappelle toutes le triste cas des conflits fratricides et ethniques perpétrés dans les ( Balkans, Rwanda, Congo etc) des viols d’une rare atrocité sous prétexte de l’épuration ethnique. Victime est arme à double tranchant, la femme violée, est non seulement victime, mais elle devient aussi paria, rejetée de sa communauté quand elle avoue sa « honte » De l’Europe de l’Est à l’Afrique subsaharienne, ce fléau persiste et les mêmes mécanismes s’enclenchent.
Depuis prés de trente ans, des travaux sont menés par des scientifiques et des gens du terrain pour mettre en lumière ces actes de terreur. Le colloque qui avait été organisé il y a quelques années à Paris, par le Centre d’Histoire sociale du XXe siècle (CHS),des Identités, Relations Internationales et Civilisations de l’Europe (IRICE) et l’Institut Historique Allemand à Paris, avait permis de réunir des universitaires, des dirigeants d’associations. Tous, ont proposé, leur version du problème, pour enfin donner une histoire à écrire, là où le silence a toujours été de rigueur…
Un comité de scientifiques s’était donc penché sur la question du viol permettant de ce fait, de rassembler les travaux et les réflexions au sujet de ce phénomène malheureusement encore endémique dans certaines régions du monde.
Chaque intervenant a ainsi pu décrire son cadre de recherches tout en soulignant aussi les limites, notamment dans le cadre de la collecte des sources.
Voici un tour d’horizon sur les interventions :
Pour Michaelina Jakala de l’Université de Bradford, la guerre en Ex Yougoslavie, fut avant tout un travail sur le terrain et sur le vivant. Dans des conditions particulièrement difficiles. Les témoignages ont été donnés principalement des femmes, et gens personnes qui ont côtoyés ces faits. Mais briser le tabou, est délicat. Et face aux traumatisme, l’historien et l’enquêteur sont aussi confrontés à l’absence de prise en charge psychologique par rapport au phénomène. Faire parler une victime, c’est aussi la condamner à revivre son trauma. Du reste, que penser de certaines lacunes flagrantes. Depuis plus de 100 ans, aucune mention de violences sexuelles n’apparaît dans les archives du Comité international de la Croix Rouge (CICR) !
Daniel Palmieri (chargé de recherches) déclare à cet effet, que l’humanitaire vit aujourd’hui dans une approche de la réalité construite sur des témoignages, mais il n’y a pas véritablement une distinction entre le témoignage des victimes. Toutefois, il est crucial malgré tout de se dire « l’information, meilleure arme contre l’indifférence » !
Plus grave encore, sous forme de métaphores ou de périphrase, le viol est à peine mentionné, selon Stéphanie Gaudillat-Cautelat dans ses recherches sur l’histoire du XVIe siècle. Les crimes et leurs auteurs ne sont jamais punis, le viol assimilé à l’adultère, reste la faute de la femme. Passés ou contemporains, les faits de guerre laissent leur empreinte indélébile sur les populations touchées. John Horne du Trinity Collège de Dublin parle de véritables séquelles générationnelles de la guerre, datant de la guerre de 14-18. Il évoque aussi la médiatisation faite à l’époque sur phénomène le transformant en une sorte de propagande, du viol conceptualisé. Presque comme un outrage fait aux hommes et du « viol de la Nation ».
Et la femme dans tout cela ?!!!
Dara Key Cohen de l’Université de Stanford, abordant le rôle des femmes combattantes et du viol dans le Sierra Léone (1991-2002) explique comment souligne la femme, exclue du recrutement et esclave sexuelle, a largement payé de son corps en participant au côté des troupes rebelles du Front Révolutionnaire Uni (RUF) aux exactions sur la population. Dans ce cadre précis, les viols collectifs avaient plusieurs objectifs, celui de créer des liens dans la fratrie guerrière en assimilant les femmes aux combattants et de récompenser celles ci par des biens et des bijoux pris aux victimes. Au Liberia, Timor, Rwanda, … ne soyons pas dans la dénégation, les femmes ontt aussi les auteurs de crimes !
A travers l’exemple du Nigeria (1987-1999) et du génocide sur la communauté Ogoni dans le Delta du Niger par l’armée nigériane, Akachi Odeomene décrit le viol comme méthode de guerre. Pour les pourchassés , les martyriser et les forcer à l’exil, les soldats pratiquent sur les Ogoni l’esclavage, le viol, la prostitution, les grossesses forcées, sur les femmes et les très jeunes jugées non séropositives. L’objectif en plusieurs étapes : avilissement, subordination, perte d’identité et de dignité, désir de déplacement et d’annihilation tout un peuple.
Mais la loi du silence s’impose et le viol est aussi et surtout un sujet tabou, indescriptible et inavouable !
La guerre d’indépendance en Algérie (1954-1962), illustre bien « la honte du viol » Malika El Korso de l’Université d’Alger évoque les premier récits sur les séances de torture pratiquées par les soldats français lors d’une table ronde à Oran en 1988. N’épargnant ni les femmes, ni les enfants, ni les personnes âgées, le viol est vécu comme la pire des calamités et les déclarations ont du mal à émerger. Selon le chercheur, les victimes et les familles restent dans un mutisme total. « Corps cachés et endommagés », c’est une histoire sans mots où seule la femme devra trouver le vocabulaire pour enfin en parler…

Le cas de la RDC
Simona Paris fonctionnaire internationale explique le quotidien des femmes victimes dans cette région.
De la guerre à la paix, la phase de réconciliation passe par la reconnaissance des violences sexuelles. La plupart des victimes restent dans le silence pour ne pas subir de représailles et être stigmatiser. Simona Paris, fonctionnaire International auprès de la MONUC à Goma, nous a parlé des horreurs que vivaient au quotidien les femmes dans les zones de conflits en RDC.
Dans les zones de conflit en RDC, le viol le plus souvent est commis par les hommes armés en uniforme: ceci inclut les groupes armés–en particulier le FDLR, aussi bien que les soldats gouvernementaux et la police. La tendance préoccupante est que le nombre de cas de violence sexuelle commis par des civils semble augmenter. Dans les zones de conflit le viol est employé systématiquement comme arme de guerre pour détruire et humilier. Dans d’autres zones il est commis par les hommes armés qui tirent profit du manque d’état de droit. La violence sexuelle est également liée aux relations de puissances et au rôle des femmes dans la société, et dans certains cas, aux pratiques traditionnelles.

Les populations les plus ciblées sont les femmes en âge de procréer , les jeunes filles , les garçons et les enfants de moins de 10 ans. Par exemple, pendant le premier trimestre 2009, au Nord Kivu 1154 cas de viol ont étés rapportés. 33% des survivantes ont un âge entre 25 et 49 ans. 30% ont 10 et 17 ans. Le viol a des sévères effets a court et a long terme sur les survivants, les familles, les communautés
La peur de la violence sexuelle a un impact sur la production et la quotidienneté: par exemple, certaines femmes ont arrêté d’aller aux champs par peur d’être attaquées.

Responsabiliser les gouvernants
La protection des civils contre la violence sexuelle est en premier lieu une responsabilité du Gouvernement de la RDC. La communauté internationale doit les aider pour établir la capacité de prévenir les violences, de fournir l’aide aux survivants, et de tenir pour responsable ceux qui commettent ces crimes. Les Nations Unies ont été préoccupées par la violence sexuelle en RDC pendant plusieurs années et étaient, en fait, un instrument pour attirer l’attention sur le problème. La Stratégie Globale de Lutte contre les Violences Sexuelles en RDC a été développée par la MONUC, les autres agences des Nations Unies, avec le gouvernement, les ONG et beaucoup des partenaires, en réponse a la résolution 1794 du Conseil de Sécurité de l’ONU de décembre 2007. Dans cette résolution, le Conseil de sécurité a invité la MONUC à «entreprendre un examen approfondi » et «de poursuivre une stratégie globale, à l’échelle de la mission», «en coopération étroite avec l’équipe des pays des Nations Unies pour renforcer ses capacités de prévention, de protection et d’intervention dans le domaine des violences sexuelles». En outre, la Résolution 1820 du CS des NU (2008) affirme que «des mesures efficaces tendant à prévenir et réprimer ces actes de violences sexuelles peuvent contribuer grandement au maintien de la paix et de la sécurité internationales,” et “lorsqu’il examinera les situations dont il est saisi, à prendre, le cas échéant, les dispositions voulues pour faire face à la violence sexuelle généralisée ou systématique».
La RDC est la première mission Onu au monde a avoir développé une telle stratégie globale, par des consultations larges avec des agences de l’ONU, des ONGs internationales et nationales et le gouvernement. La stratégie est censée être un cadre pour l’action qui améliorera la coordination et l’efficacité de l’intervention. Elle a un plan d’action très détaillé qui fournit des actions concrètes sur la façon dont prévenir et adresser la violence sexuelle.
Un aspect important de la Stratégie Globale élaboré par l’ONU en RDC est d’analyser les modèles des violences et de comprendre en détail leur dynamique. La réponse devrait être la collaboration entre partenaires: il n’y a pas un seul acteur qui peut résoudre le problème.
Les actions de la mission de maintien de la paix deviennent de plus en plus concentrées pour prévenir et répondre aux violences sexuelles. Dans quelques secteurs de l’Est de la RDC, par exemple, les soldats de la paix conduisent des escortes pour des femmes et des filles allant à leurs champs, ou patrouillent des secteurs où les femmes et les filles recueillent l’eau, afin d’empêcher des attaques.
Des équipes communes de protection composées du personnel civil avec l’expertise dans les secteurs tels que les droits de l’homme et des affaires civiles sont déployées dans les secteurs où des civils sont menacés et travaillent avec les soldats de la paix pour identifier où les femmes et les filles sont vulnérables afin d’empêcher la violence sexuelle. Pendant sa visite récente en RDC, le secrétaire général de l’ONU a invité le Président Kabila à agir pour mettre un terme à la violence sexuelle et a invité les autorités congolaises pour arrêter l’impunité.
Il faut tenir en compte que c’est l’action prises par le Gouvernement congolais, les autorités légitimes et les communautés elles-mêmes qui feront la plus grande différence. La législation congolaise sur les violences sexuelles aiderait beaucoup a combattre ce fléau, mais il faut la connaissance de la loi, la capacité de l’Etat, et la volonté de tous a mettre ces lois en œuvre.

Autre stigmate: les enfants nés des viols

Les enfants nés du viol soutiennent les conséquences des stigmates associés a la violence sexuelle. En RDC normalement les enfants détiennent leurs identités de leur père. Si le père est inconnu ou est vraisemblablement d’un groupe ennemi, ceci est reflété négativement contre la mère et l’enfant. Très souvent, des femmes qui sont des survivantes de viol sont rejetées et vivent donc comme mères célibataires. Ceci a des conséquences négatives sur leur vie et la capacité d’alimenter et prendre soin de leurs enfants. Le résultat est que ces enfants sont fréquemment sous-alimentés et n’ont pas accès aux soins de santé et à l’éducation
Il y a beaucoup de stigmates associés à la violence sexuelle et ceci représente une barrière pour la prise en charge des survivantes. Dans les actes, plusieurs femmes ne dénoncent pas le viol et souvent ne se réfèrent pas à un service médical dans le délai de secours de 72 heures. La réintégration est un moment très sensible pour des femmes et il y a beaucoup de travail en profondeur à faire avec leurs familles et leurs communautés. Plusieurs organismes ont mis des programmes de médiation en place dans la communauté et dans la famille pour aider les survivants: Grâce aux campagnes menées par différents organisations et personnes, par la première dame de la RDC, Mme Olive Kabila, et d’autres initiatives, plusieurs femmes ont dénoncé le viol et les communautés sont de plus en plus ouvertes a en parler.
D’un autre côté, il y a des réactions favorables par quelques communautés qui mettent en place les mécanismes pour protéger la mère et les enfants.
Plusieurs initiatives sont a ce jour entreprises pour essayer d’attirer l’attention du monde sur ces actes de violences sexuelles. On doit partir par l’éducation: faire comprendre aux enfants que le viol est un acte répugnant.
Pour renforcer la prévention, il faut aussi publiciser les jugements les plus rigoureux contre les auteurs.
Il faut continuer a supporter les femmes qui brisent le silence, comme la campagne menée par V-DAY-UNICEF.
Pour réduire la stigmatisation, il faut donner la parole aux associations de femmes et impliquer les dirigeants locaux et religieux dans la réduction de la stigmatisation. En plus, il faut mettre l’accent sur les exemples d’époux ou d’autres membres de la famille qui accueillent les survivantes et supportent leur réintégration.

En conclusion, ce qu’il faut retenir c’est que l’agression sexuelle est une blessure non visible, le viol a de graves conséquences sur la santé physique et mentale des femmes. Or « Parler du viol » à défaut de tout réparer, est pour Alisa Maratcuas (Association of Concentration Camp Torture Survivors) le moyen d’acquérir un statut de victime. Leçon pour le monde entier, aux gouvernements, à la justice et aux médias, le témoignage reste encore aujourd’hui, le seul moyen qui permet d’inscrire le fait de guerre dans l’actualité.
Il signifie, reconnaître les femmes traumatisées et les enfants nés de ces outrages, il est le seul moyen à terme de pouvoir mettre en place un véritable soutien médical adapté. Toutes les victimes, après coup, avouent être heureuses d’avoir témoigné…
Aujourd’hui, les actions humanitaires doivent cependant faire preuve d’efficacité et de discrétion, pour ne pas jeter le discrédit sur celles qui viendraient se confier. Avec le programme d’assistance mis en place au Congo par le CICR, Nadine Puechguirbal (conseillère sur les questions de femmes, Genève) explique l’importance du rôle du des Maisons d’Ecoute aux victimes. Des structures, qui permettent de reconstruire psychologiquement, qui initient, les femmes à des activités pour mieux se réintégrer dans la société. Mais le miracle doit aussi venir, des gouvernants, de leur force de sécurité, de la défense sociale avant tout, sans quoi les efforts des ONG et des institutions onusiennes feraient œuvre de placebo. Il faudra aussi et surtout, faire un profond travail sur les mentalités afin de permettre aux hommes de la communauté atteinte, de changer de comportement et de prendre en charge eux même, cette réinsertion sociale des victimes, femmes et enfants nés de ces conflits. En attendant, les marches, les marathons, les initiatives caritatives et humanitaires comme le Cross féminin au Katanga Lushu’aelle destiné à récolter des fonds pour les victimes, sont un début d’espoir dans une marée d’injustice…

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