Henri Sagna : l’Art au service d’une paix durable dans le Monde
Par Fériel Berraies Guigny
C’est durant notre beau voyage au Sénégal, qu’UFFP en mission, invitée au Sommet Africités, a pu en marge des conférences sur les collectivités locales africaines, aller à la rencontre de ces artistes sénégalais qui font la vie culturelle de la Teranga. Un véritable coup de cœur pour l’artiste Henri Sagna qui outre sa créativité, a toujours eu une démarche engagée dans ses créations, étant depuis toujours partisan d’un Art sans frontières et porteur de paix. Artiste plasticien humaniste, Artiste universel, c’est ainsi qu’Henri Sagna s’est présenté à nous pour la première fois. Ayant exposé entre autre en France à la Cité internationale des Arts, à Berlin, en Suisse, au Canada, en Algérie au Festival Panafricain. Henri Sagna a voyagé un peu partout et parfois ses créations sans lui. Henri Sagna est né à Dakar en 1973 ; il a été formé à l’École nationale des arts de cette ville et a reçu, en 2005, le Premier Prix du sixième Salon national des artistes plasticiens sénégalais. Adepte de la « récup », il collecte et assemble dans des installations originales. Sa démarche vise à sensibiliser le grand public et les habitants des banlieues, des bidonvilles, de la campagne à l’environnement. Centrant son travail plastique autour du moustique porteur du paludisme, qui en Afrique comme ailleurs tue plus que le sida, Henri Sagna cherche à lutter contre la maladie. Mais son projet va plus loin : en rapprochant le caractère du moustique de celui de l’homme, il dénonce les guerres et les injustices.
Et la rencontre vaut bien le détour. UFFP vous le fait découvrir.
Chambre à Air un Art particulier
Henri Sagna, qui puise dans les restes des voitures et des vélos les matières de sa création, s’inscrit en plein dans ce que l’on nomme le « recycl Art » ecofriendly. Et puis, il y a aussi le fer forgé avec un peu de soudure. Mais la chambre à air reste son matériau fétiche ; c’est au Nigéria dans le cadre d’un workshop en faisant une prospection dans la ville, et en regardant les ordures et les déchets rejetés dans la ville dont beaucoup de chambres à air, qu’il a décidé de l’utiliser dans sa démarche artistique.
Dans son installation lors de l’exposition au Centre culturel français, nous avions côtoyé des objets hétéroclites et insolites et des installations aux noms évocateurs comme « un autre Monde est possible » et l’on voit aussi les emblèmes des religions la croix catholique le croissant musulman !
Présentant son parcours, il nous explique comment il avait commencé par faire une expo écolo sur la thématique des moustiques pour le département de l’environnement dans lequel il œuvrait alors au Sénégal. Henri Sagna s’était alors complètement immergé sur son environnement (le monde universel) et avait imaginé au travers d’un passage au Musée de la Chasse en France et en Camargue ensuite au Musée Saint Louis, une exposition avec des moustiques.
Les scientifiques prédisant un retournement du climat, pensent que les moustiques du Sénégal vont se déplacer en Camargue, des changements climatiques qui vont amener un impact réel sur les migrations des insectes. Quand Henri Sagna fut invité en France pour parler des effets du palu, il constate alors que les choses allaient plus loin « j’ai fait une métaphore de l’homme par le moustique pour parler du mal » persuadé que l’homme fait beaucoup de mal et qu’il en est le principal instigateur : « le mal vient de nous » et il faut parvenir à éradiquer la souffrance inutile, si on veut changer les choses.
Un artiste témoin de son temps
Après un petit clin d’œil au cinéma d’animation, premier amour de l’artiste sénégalais, Henri Sagna s’est tourné vers la création d’installations artistiques. Et son exposition au centre culturel français de Dakar questionne sur les grandes valeurs de notre humanité ou comment être le « témoin de notre temps sans pour autant subir » explique-t-il.
Pour Sagna, il faut que « l’Art engage une réflexion », et notamment en évoquant les relations entre le catholicisme et l’Islam les deux grandes religions qui de par leur histoire, n’ont pas toujours été en dialogue, voir ce qui peut les réunir là où les hommes les ont séparées.
Un Art qui fait réfléchir en quelque sorte, c’est la marque « Henri Sagna » car outre l’aspect esthétique, il faut tenter de toucher l’humanité, la réconforter quand elle a mal, la conforter face à certaines réalités « je veux à travers ce que je fais, prôner la paix et le dialogue » explique Henri Sagna. Dans un monde où la tolérance et la cohésion ne sont plus une variable naturelle.
Au Sénégal pays de paix, où cohabitent pacifiquement les deux religions, Henri Sagna est convaincu que le dialogue est facteur de compréhension « mais il faut se garder de camper sur nos acquis » explique l’artiste, « rien n’est jamais immuable, il faut continuer à donner l’ exemple pour la région et le Monde ».
Penser l’Art comme une Conscience
Se poser les bonnes questions, amener les autres à le faire, est un exercice de style qui reste nécessaire pour l’Artiste « je n’aime pas heurter, j’aime montrer les choses et les exprimer à travers mon Art de façon simple et réfléchi » explique t-il.
En tant qu’artiste il se sent comme un maillon de la chaîné humaine « je me sens très concerné par ce qui se passe dans le monde, les révoltes populaires, les mouvements de jeunes qui sont indignés et qui réclament des droits, je me sens dedans, avec eux ». Henri Sagna est un artiste engagé et qui n’a pas peur de le dire ; il a le rêve de voir cesser les dangers qui sont liés aux histoires de doctrines et d’appartenance religieuse.
Henri Sagna
Mettre fin à la souffrance des peuples
Il est temps que l’on donne la voix aux indignés, que l’on arrête de voir passivement les gens et les jeunes souffrir, en leur tournant le dos.
Abordant le printemps arabe et ses conséquences désastreuses, Henri Sagna n’a pas caché sa peine «ça, ça me fait très mal et je vis à travers les jeunes et les peuples de la région, leurs souffrances ; pour un pays comme la Tunisie longtemps une référence démocratique pour notre région, les dommages sont considérables » !
Mais si on doit voir le problème de l’absence de démocratie comme une donnée régionale, il faut se dire aussi qu’il est temps d’éduquer les jeunes « c’est à l’école que l’on doit apprendre la paix, en faire une culture et une pratique au quotidien » explique l’artiste sénégalais.
Le changement viendra de la société civile « la lutte n’est pas finie, le chemin est long et on a du pain sur la planche » !
Le dialogue entre les religions, la paix entre les hommes, motivent depuis toujours la démarche de l’artiste Sagna.
Henri est un grand artiste qui a un sens élevé de la plastique de la réflexion