Sara Martins : du Cap Vert à la France star sans frontières
Par Elyssa Souissi
Sara Martins nous l’avons découverte avec Pigalle, la nuit, et plus récemment, dans Signature. Elle promène son joli minois dans nos séries télévisées populaires et s’impose de plus en plus dans le métier. Native de Faro au Portugal, d’origine Cap Verdienne elle s’est exportée à l’international et a adopté la France pour un temps. Sara Martins passe quelques mois aux Antilles, où elle interprète le premier rôle féminin d’une coproduction entre France Télévisions et la BBC, tournée en anglais. Femme Africaine l’a rencontrée pour vous à l’issue de la pièce » Race » qu’elle joue avec Yvan Attal.
Entretien:
vous êtes née au Portugal mais vous êtes d’origine cap verdienne. Que gardez vous de vos racines africaines ?
Je garde le meilleur de la culture Cap-Verdienne, à savoir la musique évidemment, qui a une place très importante dans ma famille, et la cuisine. Mais aussi un certain sens de l’humour, à chercher le rire même dans les moments les plus difficiles de la vie, et à ne considérer ces moments que comme des épreuves dont on sort forcément grandi…..Ne pas craindre le lendemain…. et surtout un goût très prononcé pour le voyage, la communauté Cap-verdienne est une grande diaspora.
On vous connait pour avoir fait des séries au petit écran sur des thématiques qui sont toujours très engagées, qui touchent souvent l’aspect social et dont la plus emblématique reste » Pigalle la nuit » parlez nous de cette expérience?
J’ai eu la chance d’être engagée sur des projets engagés comme « Par Amour » d’Alain Tasma sur les femmes en prison ou « Les Mariées de l’île Bourbon » d’Euzhan Palcy sur les premiers colons à la Réunion, ou encore « Après l’océan » d’Eliane De Latour, sur l’émigration…. j’ai appris beaucoup de ces expériences et de la rencontre avec ces réalisateurs. C’est en effet très gratifiant et formateur de dépasser la simple satisfaction d’interpréter un nouveau personnage mais plus largement d’embrasser une cause et d’essayer, à travers une fiction, d’en rendre quelque chose.
« Pigalle » n’était pas à proprement parlé engagée, mais socialement très intéressante car le héros de la série est un quartier emblématique de la capitale, et c’était fou de tourner dans l’agitation du quartier, au milieu des gens, de la manière la plus discrète possible pour en rendre l’image la plus authentique possible. En tant que comédiens, on était hors du confort d’un tournage en studio et j’ai adoré ça !!! avec tous les imprévus que cela implique. C’est un quartier étonnant où toutes les couches sociales se côtoient, avec une forte légende artistique et de voyoucratie…mais le quartier change beaucoup. Et surtout c’était un vrai challenge pour moi, d’abord physique puisque j’ai dû apprendre le pôle dance pour incarner le rôle de cette reine de la nuit, mais surtout parce que j’ai dû dépasser ma pudeur, assumer une féminité exacerbée et élargir ma conception de la sexualité….
Avec signature, c’était plus facile ?
Sur « signature » j’ai retrouvé le réalisateur de « Pigalle » et son équipe, donc c’était à la fois plus simple parce que j’étais en terrain connu mais à la fois j’avais une pression folle car je voulais trouver le moyen de surprendre encore cette équipe. Et puis comme dans « Pigalle » nous nous sommes immergés dans un environnement, ici, l’île de la Réunion avec ses paysages spectaculaires et la force et la violence que dégage le volcan. J’étais surtout bien entourée : Sami Bouajila et Sandrine Bonnaire sont des partenaires incroyables et je me suis laissée guider par leur talent, expérience et générosité.
les acteurs de la « diversité » sont toujours confinés à certains rôles toujours liées au milieu de la diversité. Faut il casser ces clichés? les Hafsia Herzi, Leila Bekhti et Aissia Maigia se sont imposées, mais elles restent peu nombreuses sur la place qu’en pensez vous?
C’est vrai que jusqu’à présent les acteurs « de la diversité » étaient un peu confinés dans des rôles clichés et surtout qui stigmatisaient une certaine image de certaines populations. Ce qui empêchait surtout à ses acteurs de révéler l’étendue de leur talent. Bien sûr qu’il faut que cela change, d’abord parce qu’aujourd’hui, les enfants d’immigrés ont eu la possibilité de faire des études et d’accéder à des postes différents et des couches sociales différentes de ceux des générations précédentes, donc pourquoi ne pas le montrer dans nos fictions ?
Les choses changent, difficilement, mais elles changent. Je serai bien ingrate de dire le contraire parce que j’ai souvent incarné des personnages qui n’étaient pas prévus pour des femmes noires. Et les actrices comme Aissa Maiga ou Leila Bekhti sont devenues des modèles encourageants. Il est moins question de leurs origines que de leur talent maintenant.
Mais il y a encore du chemin à faire, c’est vrai…..
Avec Race la pièce que vous allez jouer avec Yvan Attal, la thématique du viol et du harcèlement, assez d’actualité du reste, est abordée. Comment appréhendez vous cette expérience?
La pièce a été écrite par le célèbre scénariste américain David Mamet et s’est jouée à Broadway en 2009. Donc bien avant l’affaire DSK.
Yvan Attal et le metteur en scène Pierre Laville ont vu la pièce à Broadway et ont tout de suite choisi de la monter en France, mais l’emploi du temps de chacun ne permettait pas de le faire avant Janvier 2012, et du coup, c’est vrai que les évènements de cet été nous ont un peu rattrapés. Au fond, ça prouve que la question était très d’actualité. Le sujet de la pièce est un homme riche et blanc accusé de viol sur une femme noire dans un hôtel à New York. Après, la comparaison avec DSK s’arrête là. Dans la pièce, cet homme vient dans ce cabinet d’avocats « multi-racial » , deux associés, un blanc un noir et une stagiaire noire… et ces derniers se demandent alors s’il faut prendre cette affaire et comment défendre ce cas. Il est question de tous les préjugés auxquels nous sommes tous encore soumis, blancs comme noirs, on questionne aussi le principe de justice mais aussi la discrimination positive aussi bien que les symboles « riche blanc dominant » et « pauvre femme noire ». C’est un bon thriller juridique. Je suis contente de faire partie d’un projet qui aborde autant de sujets brûlants….et je suis très heureuse de voir que le public réagit bien et qu’on débatte autant à la sortie de la pièce.
Prochainement, vous faites aussi une série anglaise qui sera tournée en Guadeloupe?
J’ai déjà tourné la saison 1 de cette nouvelle série pour la BBC « Death in paradise » tournée en Guadeloupe.
C’est l’histoire d’un brillant policier anglais, so british, un peu rigide, envoyé pour régler les scènes de crime sur cette île fictive, de double culture française et anglaise… et bien sûr il est en parfait décalage avec le climat et l’art de vivre caribéen …. et les relations avec sa binôme française, en l’occurrence moi, sont très « amour-haine ». C’est l’occasion de rire de tous les clichés british/français. la série devrait bientôt être diffusée sur France 2. En tout cas le public anglais a beaucoup aimé. C’était un bon challenge d’assumer tout un tournage en Anglais…. c’est une comédie policière sur laquelle je me suis beaucoup amusée et je suis très heureuse de repartir faire la saison 2.
I will miss Camille. The chemistry between her and both the British detectives was perfect, esp. with Ben Miller. I hope her replacement will have the charisma Sara has. I was an au pair in Paris when I was 19 years old so love anything French. I am lucky to be able to see Death in Paradise here in the San Francisco Bay Area on public TV. British and French shows are so much more interesting than America dramas/mysteries with great plots and actors.
A great show and an excellent actress.