Pour la première fois depuis sa création en 1998, le FIFMA (Festival du Film des métiers d’Art) a étendu son champ d’expression à l’ensemble des métiers d’art, alors qu’à l’origine le focus était donné autour de la création céramique, ce qui explique le lieu du Festival qui se tient à Montpellier, ville bien réputée pour son travail autour de la céramique. Rebaptisé Festival International du Film des Métiers d’Art (FIFMA), durant cette dernière édition, il a mis à l’honneur la créativité artisanale et tous les métiers qui en découlent, dans toute leur diversité.
Un reportage de Fériel Berraies Guigny, photos de Diane Cazelles pour UFFP
Un joli rendez-vous qui célèbre les films des métiers d’Art pluriels à Montpellier sous le parrainage des Ateliers d’Art de France.
Par Fériel Berraies Guigny. Photos Diane Cazelles pour UFFP
Ce festival inédit contribue à développer toujours plus la création et la diffusion de films sur les métiers d’art issus du monde entier. Il amène aussi un regard nouveau sur toutes ces petites mains qui travaillent en général dans l’ombre de grandes marques ou dans la solitude de leurs ateliers.
Ce genre de festival amène une réelle réflexion sur des métiers pas toujours bien valorisés ou pas toujours bien appréhendés. Il stimule aussi, les échanges interculturels et sensibilise le grand public à l’univers souvent méconnu des métiers d’art.
Serge Nicole Président des Ateliers d’Art de France, en discours d’ouverture du Festival
Un rendez-vous auquel la team d’UFFP a pu prendre part, l’espace de deux jours. Une totale immersion dans l’amour du bel ouvrage international et la nécessité pour certains d’entre eux de trouver des alternatives à une crise qui met en danger certains métiers (KAKIEMON Japon, Tuiles, Tapisserie etc.)
vue d’ensemble depuis l’enceinte du Corum de Montpellier
C’est sous la présidence de Denis Chevallier, anthropologue et conservateur général au MuCEM, le jury du Festival était composé d’Audrey Brès (directrice du site Yookô), Lison de Caunes (marqueteur de paille et Maître d’Art), Christer Dynna (critique d’art norvégien), José Luis Figueroa (réalisateur mexicain et lauréat du Festival en 2012), Antoine Leperlier (artiste verrier et Maître d’Art), Lionel Pernet (directeur du site archéologique Lattara – Musée Henri Prades) et Barbro Schultz Lundestam (journaliste et réalisatrice suédoise) que le jury a pu donc décerner 5 prix à la fin de la compétition.
Une partie des membres du jury
Leurs choix ont été guidés par la volonté de récompenser des œuvres cinématographiques mettant en lumière les tensions fécondes entre tradition, création et innovation. Ils ont également valorisé la place de l’humain au cœur du propos, lorsque le lien entre cinéastes et sujets filmés était palpable et profond. Enfin, ils ont été sensibles aux œuvres traduisant la manière dont les métiers d’art donnent une valeur au quotidien et contribuent au mieux vivre ensemble. Les festivaliers étaient eux aussi invités à se prononcer par vote afin de décerner le Prix du Public.
l’autre seconde partie du jury du festival
Au programme, principalement, des documentaires, des courts ou long métrages, des films expérimentaux, des films d’animation avec 8 pays présentant leur univers créatif et également leur patrimoine artisanal. Nous aurons retenu des films qui n’auront pas remporté de prix mais qui nous ont marqués et qui feront l’objet de prochains reportages dans UFFP en avril et en mai.
Isabelle de Borchgrave et le film Cœur de Papier, un film grandiose de Janik Cardiec, ou l’amour pour le papier au point de le sublimer par un univers créatif très riche. Cela a été véritablement, une belle entrée en matière, redonner ses lettres de noblesse au papier en faisant des tenues et des robes historiques magnifiques, un film assez intimiste où l’on voit la passion et la fougue d’une créatrice qui a su supplanter le textile, créant sans limites et sans contraintes. Un talent, mais également, une manière sublime de parler de son Art…
Le patrimoine japonais avec la fameuse céramique Kakiémono, une immersion dans la culture nippone THE SUCCESOR OF KAKIEMONO, le film de Suzanne Raes ou les exigences d’une dynastie qui tente de survivre à des contraintes économiques et à une crise qui met à mal la production et la consommation dans le pays de la céramique. Un film très touchant parfois ,beaucoup d’humour au passage pour parler également de sujets sérieux, et d’un pays qui après la tragédie du Tsunami, tente de se relever et de se reconvertir dans le patrimoine « vivant » qu’est justement l’artisanat du KAKIEMONO « manger dans du KAKIEMONO » vous serez en meilleure santé, voici ce qui nous a fait sourire, au hasard d’un dialogue dans le film documentaire, quand on songe aux centrales nucléaires qui ne sont pas si loin…
Mais encore, l’excellent film de Fabrice Chiambretto avec Black Clay c’est à dire Argile noir , ou le subtil mélange entre un récit historique sur fond de ségrégation raciale aux Etats Unis, et comment un mouvement black contre la discrimination raciale, est immortalisé par l’art d’un artiste bronzier qui a voulu redonner la place que méritait à l’époque, une jeune militante noire américaine. Un retour entre passé et présent, et même si le film sortait de l’aspect technique artisanal, c’est justement l’histoire d’humanité qui en ressortait, qui nous a profondément bouleversé. Un big up pour ce film, dommage qu’il n’ait rien remporté !
LE PALMARÈS DU FESTIVAL de la 9E édition du FIFMA
THE WOODEN PEOPLE – GRAND PRIX ATELIERS D’ART DE FRANCE
Documentaire de Victor Asliuk (Biélorussie, 2012, 27’20)
Prix doté à 3000 euros
Mikalaj, vieil homme solitaire, est le dernier habitant de la plus grande forêt d’Europe, en Biélorussie. Il redonne vie à son monde révolu en sculptant des centaines de figurines en bois. Ses personnages forment toute une société où chaque individu naît, travaille, divorce, et où une bombe nucléaire menace l’existence de la petite communauté. Pour Mikalaj, l’art devient ainsi l’unique recours et le seul moyen de survie dans un monde devenu invivable.
REINHOUD, MON SCULPTEUR – PRIX CONTEMPORAIN ET PRIX DU PUBLIC
Documentaire de Blaise D’Haese (France / Belgique, 2012, 55’)
Chaque prix est doté à 2000 euros
Ce documentaire émouvant a séduit non seulement le jury du Festival qui lui a remis le Prix contemporain, mais aussi le public invité à voter pour son film favori.
Blaise D’Haese, le réalisateur, a perdu son père, le sculpteur flamand Reinhoud, en 2007. Il l’a filmé dans l’intimité des deux dernières années de sa vie. Il ressent un manque. Reinhoud, homme public, appartenant au mouvement Cobra, ne lui a pas parlé de son passé familial complexe, ni des rapports ambigus avec son pays, la Belgique, qu’il a quitté à 30 ans. Quand naît le réalisateur, Reinhoud est déjà âgé. Avec ce film, construit autour de nombreuses interviews de proches, d’archives photos et vidéos, le fils part à la recherche de son père et de son œuvre.
LA MARMITE – PRIX PATRIMOINE
Documentaire de Camille Virot (France, 2013, 20’)
Prix doté à 2000 euros
La fabrication d’une marmite en aluminium de récupération chez les forgerons de Bamako. Saisir une action dans sa totalité, portée par le geste juste, le savoir précis, le sens collectif : le scénario étant préétabli, il s’agit pour les yeux de la caméra, fascinée par tant de concentration physique, de s’y plonger en toute légèreté.
THE STICHES SPEAK (TANKO BOLE CHHE) – PRIX DU FORMAT COURT
Film d’animation de Nina Sabnani (Inde, 2009, Animation, 12’)
Prix doté à 2000 euros
Ce documentaire animé relate l’histoire d’artisans de la région du Kutch en Inde qui se sont unis pour créer le Kala Raksha Trust and School for Design. Le film fait appel à un procédé narratif traditionnel utilisant appliques et broderies, grâce auquel les artisans expriment leurs sentiments face à la vie. Entre dialogues et souvenirs, quatre voix racontent leur implication dans l’évolution de leur artisanat.
TUILERIE ROYER – PRIX DU JEUNE RÉALISATEUR
Film expérimental de Nicolas Humbert (France, 2012, 4’)
Prix doté à 2000 euros
Jacques creuse ce trou depuis 62 ans. Lui seul sait comment manier l’argile et la préparer pour la tuilerie. « C’est un métier dur ». Il a tout fait pour que son fils Jean-Louis, ne prenne pas la même voie. Mais Jean-Louis aime le feu. Il reste devant des heures durant, pendant la cuisson de ses briques.
Un joli festival avec plein d’images, de couleurs, d’émotions, d’amour pour le bel ouvrage artisanal, de réalisations et scénarios de qualité, un Festival que nous encourageons dans la durée, mais surtout pour les artisans du Monde, pour lesquels nous avons dédié l’édito du mois d’avril !
le déjeuner entre les séances du Festival, moment très convivial et fin gourmet