RAZAZARIVOLA VOLOLONA Esther : la bataille contre la violence foncière dans les zones enclavées
Par Fériel Berraies Guigny
Esther RAZAZARIVOLA VOLOLONA : la bataille contre la violence foncière dans les zones enclavées
Par Fériel Berraies Guigny
Nous avons rencontré cette femme incroyable dans le cadre d’Africités Dakar, sommet qui s’était tenu il y a quelques temps dans le pays de la Teranga. Elle fait partie des lauréats du Prix Harubuntu, initiative de l’ONG Echoes communication, partenaire d’Africités. Une femme engagée, hors du commun qui au travers de l’Association Avenir, n’a pas peur des obstacles ni des défis et qui a choisi de mener une croisade contre la violence foncière dans son pays, subie par les paysans de la localité du FOKONOLANA. Pour Esther, il est temps de considérer la « primauté de l’Homme » et de restaurer la valeur humaine souvent bafouée.
Ses combats qui sont multiples, sont toujours axés sur le respect de la dignité de l’homme qui doit exister en tant qu’individu mais également pouvoir vivre de son travail. Et puis, en sous jacent permanent, il y a la préservation et la défense de la culture dont le « Fihavanana » (l’amitié, le partage, la convivialité, le conseil, l’écoute, la fraternité, le respect ….) qui est en voie de disparition.
Madame Esther Vololona Razazarivola
Coup de cœur du jury pour le prix Harubuntu
Thématique : le foncier et les droits – Madagascar
L’initiative orchestrée par Ester, consiste à lutter contre les injustices qu’endurent les villageois, victimes de non droit dans les zones enclavées afin de les aider à entreprendre les démarches à faire jusqu’à l’obtention des Livres Fonciers.
Les villageois, quotidiennement confrontés aux mauvais traitements des autorités en charge de la propriété foncière compétentes qui abusent de leur pouvoir, ont trouvé à travers Esther et son Association « Avenir », le soutien et le recours opérationnel et médiatique qui pourront les aider à faire valoir leurs droits.
Entretien avec UFFP :
Face à ce problème difficile, des membres du Fokonolona se sont adressés à l’Association AVENIR ?
Oui l’Association AVENIR apporte son soutien à ces membres du Fokonolona Mantasoa pour éviter la détérioration de l’autorité de la loi, et pour que ces paysans puissent profiter de la sueur de leur front loin de la violence.
Il n’y a une nouvelle loi qui est apparue cependant ?
Actuellement, pour permettre aux gens d’avoir plus de protection sur leurs terrains non titrés mais occupés de façon traditionnelle depuis longtemps ou constituant le patrimoine familial transmis de génération en génération, une nouvelle Loi foncière est apparue, qui fixe le régime juridique de la propriété foncière privée non titré et aurait du permettre d’organiser les services administratifs ad’hoc et les commissions chargées de statuer sur les demandes.
Cette initiative ne résolue pas encore le problème foncier de Mantasoa ?
Non, mais les situations sont très diverses. Parmi ceux qui ont pu faire valoir leurs droits, on trouve bien évidemment ceux qui ont un niveau d’instruction suffisamment élevé, des ressources financières importantes ou des appartenances, accointances ou appuis politiques proches du pouvoir.
Pour les autres, qui constituent une majorité mais qui en tant qu’occupants ont travaillé la Terre, l’ont mise en valeur par la plantation d’arbres, par la mise en culture vivrière et par la construction de maisons d’habitation, la situation est plus délicate : il y a des analphabètes, il y a ceux qui méconnaissent leur droit, il y a ceux qui n’ont pas de moyen financier stable, il y a les pauvres ; L’ignorance constitue donc un grand obstacle et engendre la peur de rentrer dans un bureau du Service Administratif ou de rencontrer les responsables, lesquels ne se montrent pas toujours coopératifs. Bon nombre d’entre eux ont déposé leur demande d’acquisition de terrain au même titre que les privilégiés, mais leurs dossiers ne sont pas régulièrement instruits, et ils n’arrivent pas à obtenir le Duplicata de Titre Foncier.
Par ailleurs, les Responsables du Service de Domaine et de Topographiques, se montrent souvent réticents, et prennent l’habitude de faire revenir les villageois à une autre date, après une longue attente, essayant ainsi de les décourager
La lenteur administrative doit être combattue, car pour beaucoup de demandeurs, il s’agit de faire valoir leurs droits et de leur permettre de vivre décemment de leur travail. Il faut attendre des années pour avoir une information de dossier ou pour accomplir une phase dans la procédure d’acquisition de terrain ;
La corruption active ou passive doit également être combattue en abolissant les privilèges de ceux qui ont des moyens financiers, une certaine influence politique ou sociale, ou une certaine autorité hiérarchique.
Pour ces occupants défavorisés, l’éradication d’une telle discrimination reste un rêve.
Que propose L’Association « AVENIR » et la Justice ?
Avec l’Association AVENIR, ces occupants ont saisi la Justice pour faire valider leur droit sur les terrains occupés.
D’abord, l’association AVENIR a fait une demande afin que le Service Topographique procéde à la délimitation des parcelles occupées par le Fokonolona;
En exécution de l’ordonnance du Tribunal, les agents du Service Topographique se sont rendus sur les lieux, et des plans Topographiques sont délivrés depuis cette action, à chaque opération ;
Le principal objectif est que le droit de possession des terrains mis en valeur par leur travail quotidien et ce depuis des générations soit reconnu par le Tribunal
Votre expérience Harubuntu ?
L’Harubuntu a illuminé mon Esprit et m’a aidée à :
Appréhender la relation entre mon projet et l’avancée sociétale dans les zones enclavées et
Etre convaincue qu’ici en Afrique, là où je suis, il y a de la valeur.
Savoir que je suis une vraie porteuse d’Espoir aux villageois analphabètes dans les zones enclavées
Savoir Cerner le problème entre les valeurs humaines et la valeur morale et être encouragée par la découverte de la vie de l’Harubuntu,
Découvrir que Dieu m’a réservé une autre forme de famille dont La famille Harubuntu.
Après l’obtention de ce prix, quels sont vos attentes, vos souhaits, vos objectifs ?
Je continue mon projet et je vais étudier et profiter d’autres expériences pour devenir experte en matière de violence foncière. J’aimerai également que l’Association AVENIR soit implantée dans d’autres pays d’Afrique et qu’Harubuntu soit connu et reconnu par toute la population malagasy et africaine.
Je souhaite devenir une femme créateur de richesse, non pas pour moi mais pour les autres. La possession de Livre Foncier est une richesse collective dans la mesure où les paysans peuvent jouir et profiter de leur bien (terre et production) tout en espérant, par leur travail, améliorer leur situation financière (caisse retraite, perspective d’une économie de marché, scolarisation des enfants) Ce titre foncier vaut une richesse inouïe et utile pour le développement des villageois paysans et les futures générations ainsi que de la région de Mantasoa.