j’écris cet éditorial ce mois d’avril 2020 et c’est le plus douloureux de ma vie…
Il est historique aussi car il se loge dans une pandémie mondiale historique pour l’humanité, signant une véritable hécatombe, la fin d’un monde, la fin d’acquis que l’on croyait assurés et moi à côté de cela, je vis un double purgatoire, je perds mon amour, mon mari, le papa de mes jumeaux d’un cancer terminal dans ce COVID SANS NOM.
ce billet je le dédie à l’amour d’une vie, l’amour de ma vie, le papa de mes enfants… Gilles GUIGNY
Fériel Berraies et Gilles Guigny unissent leur vie le 17 avril 2004 à Ozoir la Ferriere
on s’est rencontrés il y a 16 ans, j’étais une jeune diplomate promise à une carrière incroyable au sein des Affaires Etrangères de mon pays… je me séparais de mon premier mari diplomate après trois ans d’un mariage à longue distance, lui à Moscou jeune diplomate, mon papa Ambassadeur à Berlin et moi jeune conseiller des Affaires Etrangères non titularisée dans mon poste… habitant seule dans la maison de mes parents, alors que j’étais mariée.
Trois ans de mariage sans cohabitation réelle avec un mariage qui est resté un mariage sur papier car le destin l’avait voulu ainsi et parce que suite à de profondes divergences, j’avais décidé de quitter une union où j’étais profondément malheureuse, même si le MAE ne m’avait pas fait de cadeaux, contribuant entre autre au délitement de cette première union.
Je me rappelle encore aujourd’hui, de mon amie khadija M qui me dit, je connais un site sympas, juste pour te changer les idées, tu peux échanger avec des personnes sympas et c’est juste pour te changer les idées… oui un jeu, une diversion initiale, qui est devenue le grand amour de ma vie.
Ce grand amour qui m’a valu de tout quitter car il m’avait dit » prends le risque d’être heureuse » je n’oublierai jamais ces paroles qui continuent à me hanter aujourd’hui, son pseudo lui l’amoureux d’Aragon était « Que serai je sans toi » et moi « Renaissance » tous deux avions cette irrépressible envie de nous reconstruire, d’être heureux, d’oublier un premier échec affectif.
Il est français, je suis tunisienne, papa de 4 enfants, dix ans de plus que moi, il habitait ailleurs, et pourtant on s’est aimés à la folie. Moi je suis venue il y a 16 ans avec deux valises et un chat
( isis allah yarhamha ( elle s’est éteinte en avril dernier entre mes bras et je porte encore les stigmates de son absence)
Cet homme merveilleux m’ a fait la Cour à l’ancienne, m’écrivait de longues poésies et chaque jour il guettait tout comme moi cette magnifique lettre d’amour qui me donnait l’impression d’être la plus belle femme au monde, la plus « unique » si cela est possible.
Je profitais le matin entre mes heures de pause au boulot pour lui écrire ce mail d’amour tant attendu, je me réveillais à la lecture de ces mots et m’endormais à la lecture de ses mails.
Il m’a séduite par la prose, l’intelligence émotionnelle et cette faculté qu’il avait de m’analyser de deviner tout de moi avant que je ne m’exprime.
Il était bon, il était généreux, il était entier et honnête.Il est du signe gémeau comme mon papa et mon premier époux, à croire que j’attire ces hommes, même si au fond nous sommes si différents, l’intellect oui, mais moi l’hyper sensible et émotionnelle colérique et impulsive et lui le cartésien, le pragmatique, l’inhibé, froid et distant, ça fait pas bon ménage. Pourtant nous étions passionnément amoureux. Et nos divergences dans le feu de cet amour incroyable improbable, moi la fille du Sud et lui l’homme du Nord ne comptaient plus.
Notre union ne fut pas facile, j’ai du cacher cela à mon papa pendant des mois seule ma maman et ma tante tenaient la chandelle, mais l’intelligence de ma famille et de ma grand mère allah yarhahmha ommi jamila qui ne comprenait rien du français mais qui lui parlait avec ses yeux souvent, et ensuite l’accord de mon papa, firent le reste.
J’ai épousé le 4 avril 2004 mon amour Gilles, un mariage des mille et une nuit en Tunisie une sahriya somptueuse au Golden Tulip où prés de 300 personnes ont vu notre bonheur ( diplomates, ambassadeurs, conseillers du Président) furent présents.
En France, quelque chose de plus intime mais tout aussi beau, car mamie Claudine s’est éteinte d’un cancer lors de mon voyage de noces, oui, la famille de mon aimé n’a pas été épargnée par cette faucheuse que je déteste, moi qui suis du signe cancer ascendant cancer, quelle terrible ironie. Serais je la vie et la finitude aussi ?
Notre union fut tourmentée car nous vécûmes bien des épreuves et souvent mon époux me « disait nous n’avons pas eu de chance » et encore aujourd’hui cela se confirme…
Mais notre amour était toujours là, oui nous avons eu beaucoup de bas et parfois plus que des hauts, mais l’ amour fou et fort était toujours là, même si des deux parts, il y a eu des manquements car nous étions si différents et que nous avions fini par ne plus regarder dans la même direction.
Nous étions remplis de certitudes, aujourd’hui devenues de fausses croyances, et des ratages en série que l’on aurait voulu éviter, mais il est trop tard.
Comment deux êtres qui s’aiment tant peuvent avoir souffert autant,15 ans étions nous maudits ? avoir connu tant de tsunamis jusqu’à cette lame de fond qui ME LAMINE finalement et définitivement.
Oui car la vie nous DÉPASSE
En avril dernier, après beaucoup d’années, Gilles a dit qu’il ne m’aimait plus et remettait tout en question, avec la mort d’Isis et ma surenchère thérapeutique ( je donnais trop à mes patients) et tous mes questionnements existentiels, j’ ai fait un burn-out émotionnel. Et je suis partie plusieurs fois en Tunisie et j’en ai profité pour faire mes ateliers thérapeutiques dans mon pays, car dans la détresse j’ai toujours excellé, et je me rappelle encore de ma magnifique expérience avec le Groupe MONOPRIX EN TUNISIE. Gilles en était si fier, il toujours été fier de sa femme et il me l’a redit sur son lit d’hôpital…il y a quelques jours.
De retour à Noel dernier, nous sommes allés en Normandie à Dives sur Mer, je ne savais pas que cela allait être nos dernières vacances en famille.
J’étais malheureuse certes, mais moi je l’aimais toujours, et je voulais lui montrer que j’avais changé ( que j’allais devenir cette femme d’intérieur que je n’étais pas ) angoissée en questionnement me battant contre un burn-out qui est devenu une dépression, pour avoir porté tant de combats, j’ai développé une maladie rare. Une maladie du squelette la maladie de Sheuerman et trois arthroses cervicales dorsales et lombaires, en plus de calculs dans la vésicule biliaire et un kyste au foi. Je n’ai pas eu le temps de faire le scanner pour le foi, à la demande du médecin ni être prise en charge par le kiné ou la psychiatre depuis mars dernier… fouttu covid.
Dans la douleur, la résistance et le stoïcisme mon corps hurle et mon âme aussi désormais
Mais ce qui me broyait le cœur était le désamour de mon mari, car il y a un an et c’est là que j’ai compris que je m’était battue contre une chimère, celle de la notoriété et de l’accomplissement professionnel (même s’il rêvait aussi que sa femme puisse avoir la salaire à trois chiffres qu’elle méritait)
A 50 ans doublement primée, multi médiatisée, ayant fait une dizaine de premières de couvertures, écrit des livres, crée des médias, défilé dans le monde pour la paix, ce qui comptait vraiment je le perdais… l’amour du seul homme de ma vie.
Mais il ne le savait, sa maladie parlait déjà…
Quand je regarde mes 1001 Vies
(mannequin, dés l’âge de 16 ans au Canada, criminologue, chercheur en Sciences Sociales, diplomate, auteur, thérapeute, journaliste, activiste) j’ai eu 1001 vies et je sais que je n’ai pas fini, si le seigneur et la santé me l’accordent, car il faudra et quand je me relèverai… pour lui, pour mes enfants
et malgré toute cette douleur, je ne peux qu’être heureuse et avoir un sens d’accomplissement et cela je le dois à mon amour gilles, même s’il dit le contraire.
*Alors mon amour voici la lettre d’amour de moi que tu as attendu toute ta vie ,toi qui l’année dernière m’a fait la douleur de ne plus écrire ma lettre d’amour anniversaire, comme chaque année (puisque selon tes dires, tu ne m’aimais plus..) SAUF QUE JE NE T’ai jamais crue.
Animal sauvage solitaire et écorchée moi la HPI hypersensible et borderline
On me reprochait souvent mon individualisme ce besoin d’être dans une bulle loin de tout et des autres, on n’a pas compris que c »était un mécanisme de survie car je suis une éponge et une hypersensible, une personnalité HPI à haut potentiel et que j’avais des troubles de la personnalité limite ( diagnostiquée à 50 ans).
Petite on ne comprenait ma sensibilité et mon intelligence brute et émotionnelle on me disait « enti mkajoula » et cela me faisait souffrir, j’ai eu mon bac à 16 ans et je suis une hyperactive et une hyper diplômée et une hyper émotive. Visionnaire, avant gardiste, jusqu’au boutiste suicidaire pour arriver, je n’ai peur de rien et je me mets souvent en danger en sortant des systèmes NORD SUD.
Je suis l’excès et l’hyper dans tout, mais je suis moi et ce que l’on considère une « tare » est l’intelligence des écorches et des cabossés de la vie, dont je fait partie.
De l’ERNIE discale supposée au cancer généralisé en terminal…
En janvier ma vie a basculé, on a emporté mon chéri avec le Samu car il ne pouvait plus marcher, bouger et avait mal partout.
Apres des semaines de recherche, le verdict tombe cancer digestif terminal. Et la Chimio et la radio n’ont pas abouti… c’est trop tard, il va mourir, il a mal, il n’ y a plus rien à faire médicalement, il a mal, il souffre et ce fichu COVID est là rendant notre épreuve mille fois plus douloureuse…
Alors moi j’ai fini par avoir mal dans tout le corps aussi…
Depuis la mi mars je cohabite stoïquement sans rien sans médicaments ou kinésithérapie, avec la maladie du squelette, mes arthroses, mes kystes et calculs, la douleur, le chagrin le desespoir, li est partout dans la maison mais il n’est pas là et il dépérit…
Oui ton héritage
Alors, oui cette douleur incommensurable ne me laisse plus dormir, vivre, hébétée par la violence de ce qui lui arrive et nous arrive. Enfermée seule, sans l’affection de mes proches, je suis devenue en trois mois une famille monoparentale, une famille vulnérable, seule livrée à moi même.
Papa, maman, homme et femme, jardinier, cuisinière, femme de ménage, toiletteuse, shoppeuse, les pires catas arrivent à la maison et je dois gérer dans un contexte de confinement malgré la douleur de mon squelette et mes nuits de désespoir où je pleure en cris mais dans mon oreiller pour pas que les enfants entendent…
et aujourd’hui, mon amour gilles m’a dit « je t’aime » et même si hier ma petite fille m’a dit ‘ » c’est horrible maman je vais te dire un truc, même si je ne devais jamais naître, j’aurai préféré que tu ne rencontres jamais papa, t’aurai pas souffert ce que tu souffres aujourd’hui » quelle force quelle maturité ma petite fille de 13 ans, quand je la regarde elle a tout de son père …
et bien je prend ce je T’aime comme ce diamant 20 CARATS qu’il m’aurait offert, même si tristement cela me rappelle que j’ai tout perdu de ce qu’il m a offert d’un cambriolage en 2011, je sais que les deux joyaux qu’il me laisse, sont sans son prix.
Oui mon amour « notre Renaissance » même après nous, ce sera eux Elyas et Elyssa.
Mon amour tu m’habites, tu es en moi dans mes enfants, dans mes pensées, dans mes fêlures, mes ratages, mes avortés, mais tu es en moi pour toujours, l’amour d’une vie et une vie on en a qu’une
TU SAIS QUOI …
Ta chair et ton sang en moi sera notre RENAISSANCE
pour toi mon amour, écoutez pour lui et pensez à lui
Jean louis AUBERT pour toi …
PUISSES TU VIVANT CONTINUER….