Lauréat du prix Entrepreneuriat Bénin
Une Afrique de la relève, une Afrique des compétences valorisées : voici le rêve que caresse Valentin Agon depuis des décennies « être capable de trouver aux problèmes africains des solutions africaines » cet entrepreneur médical du Bénin y croit dur comme fer et du vœu pieu il est passé à l’action !
Ardent défenseur de la médecine bio environnementale, il a trouvé dans les ressources de son pays, les meilleurs palliatifs aux maux qui déciment les populations africaines : avec Api-Palu il a crée un médicament accessible aux populations défavorisées, capable de limiter les pertes humaines liées au paludisme, qui reste une cause de mortalité très sérieuse dans le Continent.
photo Diane Cazelles pour UFFP
Entretien avec UFFP
Vous menez une double mission ? Oui je suis dans la recherche bioenvironnementale pour faire découvrir le capital médicinal de l’Afrique. Depuis quelques années nous sommes investis dans pas mal de recherches. Nous étions venus au constat que l’Afrique meurt de plusieurs maladies mais paradoxalement, les médicaments sont en Afrique.
Donc vous avez décidé de trouver des solutions durables ? Oui nous nous étions dit que pour une médecine durable dans notre région, il fallait penser à effectuer des recherches sur les compagnons végétaux de nos ancêtres qui avaient survécus. Ces plantes sont toujours aussi efficaces et elles ont gardé leurs vertus thérapeutiques contre les agents pathogènes. Pourquoi alors ne pas aller fouiller dans cela ? Vers les années 80 on avait été initiés à Bruxelles sur les vertus de l’api thérapie, puis nous sommes allés à la faculté de Cuba, qui est une faculté qui faisait également des recherches dites classiques mais aussi celles basées sur les plantes. Du fait de l’embargo, Cuba s’était tournée vers ses compagnons végétaux et donc cela était un modèle pour nous.
Je suis allé ensuite au Canada pour étudier la phytothérapie qui est la richesse des plantes et rapidement en effectuant nos premières recherches, il faut les breveter. Ce que l’on a fait, on s’est retrouvés avec une demi-douzaine de brevets dont des brevets européens.
Vous avez décidé de vous attaquer à la faucheuse en Afrique qui est le paludisme ? Oui absolument, il faut savoir que 3000 enfants meurent par jour de paludisme. Et ce n’est que ce que l’OMS peut compter, alors je vous laisse imaginer…
Le moustique se multiplie, il est coriace et il est attiré par le CO2, quand l’homme dégage cela, il attire le moustique. Et comme l’environnement dans lequel il évolue ne change pas, cette tare va subsister et est un réel danger pour l’homme.
Un vaccin ? Non il n’y a pas de vaccin contre le paludisme, car ce mal est vecteur de richesses donc les firmes n’ont pas intérêt à le faire.
C’est une maladie assez létale ? Oui si vous l’attrapez, elle vous attaque et vous tue en 72 heures !
Car le plasmodium va attaquer vos globules rouges qui sont le siège de la vie humaine.
Vous n’avez pas hésité à trouver l’alternative, pied de nez à ceux qui font de cette maladie un business, vous allez vous faire des copains? (rires) il faut savoir prendre des risques pour sa génération. Mon fils en 94 a faillit être emporté par cette maladie, il a passé toutes ses journées à l’hôpital, c’est aussi cela qui m’a poussé à persévérer.
Parlez-moi de ces plantes africaines vertueuses ? Il y en a beaucoup en Afrique, le neem par ex qui est aussi antipaludique. On a sélectionné une série de plantes qui concentrées n’étaient pas un problème pour le corps humain tout en étant antipaludiques. On a obtenu un brevet en Suisse pour protéger notre découverte. Il fallait ensuite trouver du financement, et ce n’était pas facile de ce point de vue, ni les banques de la région, ni celles du Nord par patriotisme économique, car ce médicament amènerait une réelle indépendance médicamenteuse pour l’Afrique.
Quelle a été votre stratégie ? Nous avons tout fait pour nous faire remarquer, nous avons travaillé dur et c’est en fait les populations qui nous ont financées. On s’est aussi fait remarquer par l’OPI qui a choisi notre dossier à présenter au rendez vous des inventeurs en 2009. En Suisse, notre invention a reçu deux médailles d’or. Au retour au pays on a été reçus en héros, la Présidence nous a salué et c’est ainsi que l’on a été achetés et on nous a découverts. On a été achetés pour un milliard de FCFA, cela nous a donné une certaine autonomie financière qui nous a permis d’acheter de grosses machines de l’Inde. Et nous produisons aujourd’hui à grande quantité journaliérement. Deux personnes ont été recrutées et on lancé la machine partout dans le monde : Nigéria, Cameroun, Gabon, Centrafrique etc.
La gestion durable des plantes médicinales, le cœur de votre action ? Oui déjà à l’université de Mans, j’avais soutenu un master à ce sujet, aujourdhui je le fais : les paysans cultivent les plantes et il y a ensuite des intermédiaires en voiture qui viennent les recueillir et les amener dans la même journée afin que les plantes ne fanent pas. Afin de les conditionner, ensuite on extrait les plantes. On crée des médicaments faits en gélules sans aucun additif. En gélules, en comprimés ou en poudre pour les enfants.
Commercialisation depuis ? 2006, et j’ai rencontré de formidables satisfactions car il n’y a plus personne qui arrive au Bénin à l’hôpital avec un paludisme grave. Aujourd’hui, on sait plus ou moins comment traiter la maladie.
Il fallait oser ? Oui c’est de l’audace de notre part, et on l’assume. On voulait trouver des solutions africaines à des problèmes africains. L’Afrique manque de stratégie, et elle dort, et pour cela il faut oser !
Il faut que l’on s’organise car on a raté nos indépendances.
La Démocratie ? Elle deviendra l’obstacle même du développement si on ne sait pas bien manœuvrer en bonne intelligence. Mais il nous faut parvenir à créer un contexte de développement dans nos pays mais qui soit axé dans la démocratie !
L’Afrique souffre aussi de son système éducatif ? Absolument, l’Afrique produit des gens qui sont non curieux, non créateurs, non entreprenants. Si cela continue, l’Afrique va produire une bombe à retardement qui risquera d’exploser comme les jeunes en Tunisie.
Parlez nous de votre école ? Oui j’ai crée une école qui s’appelle « l’école pour l’innovation et le développement » je sélectionne des jeunes qui sont des porteurs de projets innovants.
Une première session enseigne aux jeunes les fondamentaux : la mise en valeur du potentiel humain, développement de la curiosité why and for what ? La créativité, et ensuite l’entrepreneuriat.
Ces dimensions construisent l’entreprise : je suis, j’ai, je veux et je peux et la dernière je fais !
La seconde session est composée de sept ateliers : réfléchir à partir d’un problème pour ensuite concevoir la maquette de la solution. Dans cette école, on sort avec une création.
Le troisième atelier et le quatrième atelier valorise leur savoir faire. A la fin, ils doivent rédiger un mémoire sur leur innovation. Et ils finissent en rédigeant le formulaire de l’OMPI pour protéger leur savoir. Et c’est ainsi que l’on devient entrepreneur, car on a osé, on a crée, on a innové, on s’est imposé. Toute cette formation qui dure six mois est gratuite car financée par nos produits.
Harubuntu ? On nous a invités à participer, chose que l’on a faite et notre candidature a été retenue. Je suis très heureux d’avoir été choisi comme lauréat pour l’entrepreneuriat 2013, c’est un encouragement à briller davantage, à faire encore mieux pour l’Afrique. Je veux enflammer l’Afrique avec le feu de mon action et amener les africains à créer et à entreprendre davantage