Lauréate du prix Autorité Locale Madagascar
On la surnomme la Reine des Pierres dans sa Commune pour rendre hommage à un projet aujourd’hui générateur de richesse, mais elle est aussi et surtout, une femme de poigne, de cœur et de talent, et une super maman qui a adopté une vingtaine d’enfants orphelins de sa région.
Noelline avec un diplôme de gestion en poche, a décidé de s’attaquer à un tabou dans sa société, tout en donnant l’autonomie aux femmes. Travailler et casser la pierre au départ, était pourtant considéré comme une violente effraction à la coutume. Car chez elle, les Pierres contiennent l’esprit des anciens et toucher aux pierres en quelque sorte, était inconcevable. Avec l’Association FIOMBONANTSAGA, elle est devenue une femme Chef d’Entreprise qui a initié d’autres femmes autour d’elle, à la création de richesse et à l’autonomie. Aujourd’hui, elle brigue le poste de Conseiller communale dans sa région. Avec son projet, elle a contribué à rendre dignité et autonomie aux femmes rurales de sa commune.
Travailler la pierre et améliorer les conditions de vie de son village
Au départ, un simple désir de bousculer les inerties des mentalités populaires, aujourd’hui véritable activité génératrice de revenus et permettant aux femmes de faire d’autres activités connexes comme l’élevage de petit bétail etc. et de révéler des talents d’entrepreneuses et de gestionnaires de revenus.
Reportage de Fériel Berraies Guigny photo Diane Cazelles pour UFFP
Entretien avec UFFP
En tant que conseillère de votre commune, pourquoi avoir choisi un projet spécialement pour les femmes ? Les femmes dans le village ont de lourdes tâches et elles représentent les 2/3 de la communauté, mais leur problème était qu’elles n’avaient aucune tâche génératrice de revenus.
Vous vouliez en quelque sorte, leur donner une certaine autonomie et les valoriser ? Les femmes du village dépendaient trop de leur mari, je voulais qu’elles aient leur indépendance économique. Cela était aussi un moyen pour moi de les extraire de la violence conjugale.
Pour vous les pierres ont été leur « sauveur » économique pour les femmes rurales ?
Ce sont les blocs de pierres qui vont créer la richesse. Mais au départ leur croyance faisait que l’on ne voulait pas toucher aux pierres. Il a fallut travailler contre les croyances et les préjugés, démontrer que l’on n’était pas contre « les anciens » mais au contraire pour eux.
Casser les tabous et au demeurant valoriser les aptitudes ? au début, j’ai du danser sur deux pierres juxtaposées pour leur faire voir que tout allait bien et que cela n’ était pas contre les esprits des anciens. Ensuite c’est moi même qui a du dynamiter les premières pierres. C’était très risqué pour moi au départ, car je n’étais pas dans ma commune natale, je m’étais mariée simplement la bas. J’aurai pu me faire lapider et me faire rejeter de la communauté.
Quand est née l’Association ?
En 2008 est née mon Association qui va démontrer que les pierres sont des facteurs de développement rural pour les femmes. Au début, nous étions sept femmes et en 2013 nous sommes arrivés à 630 femmes.
A quoi servent ces pierres ? Elles génèrent beaucoup d’activités selon leur taille, elles peuvent soi être utilisées pour la construction de maison ou de routes. Petites ou en gros blocs, il y en a pour toutes les utilités.
Vous avez fait tout un buzz dans votre commune? Oui j’ai lancé pas mal d’annonces au travers des autorités locales et des radios pour expliquer que même enclavés chez nous, il y avait de bonnes pierres à bon prix. J’ai fait une petite fête et j’ai rallié pas mal de gens autour de moi. Nous étions en nombre de 70 au départ, après deux mois nous avons commencé à exploiter des petites carrières.
Vous avez créé pas mal d’emplois ? Oui avec la seconde carrière, je suis arrivée à une centaine d’emplois. Quand on a des commandes, l’argent obtenu par la vente des pierres, sert à générer des microcrédits. Toutes les adhérentes peuvent emprunter par le biais de notre microcrédit. Pendant douze mois cad à court terme et sans intérêt pour le remboursement.
Beaucoup d’activités sont nées suite à cela ? Oui comme par ex, l’élevage de poules pondeuses, l’apiculture, pisciculture et viticulture. Construction d’infrastructures comme les routes afin de faire venir les camions pour acheter les pierres de notre village. Création de cantines scolaires.
Vous briguez un poste de conseillère communale ? Oui j’ai à cœur de continuer d’œuvrer pour les femmes, aujourd’hui je suis à la présidence et j’ai commencé un projet de construction d’une fontaine pour que les femmes n’aillent pas trop loin pour puiser de l’eau et risquer d’être violées. Egalement, l’électrification rurale afin que l’on ait de la lumière. La construction d’écoles primaires et d’un lycée.
Même les enfants aident ? Oui les enfants adultes peuvent aider leur mère, cela diminue l’exode rural. Et en fait, la visite de notre communauté par les acheteurs même si elle est enclavée, entraine une forme de tourisme. On est également parvenus à améliorer l’agriculture avec des surfaces plus travaillées. Cela entraine donc une diversification des ressources alimentaires, ce qui aide à lutter contre la malnutrition.
Votre projet a aussi contribué à la scolarisation des filles ? Oui car il faut savoir que la tradition à Madagascar fait que les parents n’arrivent jamais à scolariser les filles. Maintenant toutes les filles vont à l’école. J’ai véritablement réussi le développement local de ma commune.